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GENÈVE 2023

Critique : Captives

par 

- Arnaud des Pallières parle, à travers l'histoire d'un groupe de femmes internées de force dans l'enfer de l'hôpital de la Pitié Salpêtrière de Paris au XIXe siècle, de la condition féminine à l'époque

Critique : Captives
Elina Löwensohn, Mélanie Thierry et Solène Rigot dans Captives

Captives, un film qui marque la troisième collaboration entre le réalisateur français et la scénariste Christelle Berthevas, sélectionné au Festival du film américain de Deauville (Fenêtre sur le cinéma français) et en compétition officielle au Festival international du film francophone de Namur avant d’arriver au Festival international du film de Genève dans la section Highlights, réunit une troupe d’exception (quasi exclusivement féminine) formée par Mélanie Thierry, Josiane Balasko, Marina Foïs, Carole Bouquet et Yolande Moreau. Ensemble, elles rendent compte des tourments de femmes placées contre leur volonté à l’asile d'aliénés, plus précisément dans le labyrinthique hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris, soit qu'elles aient été considérées incontrôlables ou "hystériques" (comme on disait à l'époque), soit qu'il s'agisse de prostituées ou de femmes affectées d'un handicap. Oubliées comme quelque chose d’encombrant que leurs familles, et plus généralement la société, ne savaient plus où cacher, beaucoup de ces femmes n’ont plus jamais pu apprécier la douce saveur de la liberté – une liberté concédée uniquement à celles qui savaient suivre les règles et s'intégrer à un système patriarcal qui les considéraient comme de simples figurantes.

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Le moment précis qu'Arnaud des Pallières a décidé de mettre en scène est celui du "bal des folles", une soirée mondaine pendant laquelle la haute société parisienne (qui soutient financièrement l’hôpital) avait la possibilité d’interagir avec les malades, dans une sorte de spectacle grotesque assez insoutenable. L'héroïne de l'histoire racontée dans le film est Fanni (Mélanie Thierry), qui décide volontairement d'entrer à la Pitié-Salpêtrière sans que sa famille le sache, dans l’espoir de retrouver sa mère, dont elle a découvert qu’elle y a été internée quand elle était petite. Si les modalités de la prise en charge de Fanni à l'hôpital ne sont pas clairement expliquées (on se demande, légitimement, si c’est aussi facile que cela de se faire interner et pourquoi elle n’essaie pas de trouver une autre manière d’enquêter qui ne mettrait pas en danger sa propre vie), ça n’empêche pas de croire à ce que le film nous raconte. Au fond, ce dont il traite, c'est justement de la perméabilité du concept de vérité, la possibilité de percevoir la réalité de mille façons.

Captives, riche en gros plans qui font ressortir chaque geste, chaque tremblement, jusqu'aux pores de la peau, se fixe pour objectif de (re)donner la parole à celles auxquelles ont l'a toujours refusée, mais ce ne sont pas les mots (souvent utilisés par l’agresseur) qui racontent leur histoire : c'est plutôt la douleur, la colère et l'incompréhension qu’elles ont accumulés dans leur corps. Le film, quasi exclusivement peuplé de personnages féminins (la musicienne incarnée par Carole Bouquet, mise à l'écart par son frère pour qu'elle soit exclue du testament, la fille-mère, la couturière rêveuse qui s'avère être la mère de Fanni, ou encore la prostituée interprétée par Dominique Frot, qui connaît très bien le monde) le film exclut volontairement de son propos tous ceux qui ont déjà beaucoup parlé, pour ne pas dire trop.

Touchant, très bien documenté et porté par une troupe de comédiennes franchement impressionnantes, ce drame historique mis en scène par Arnaud des Pallières ne tombe jamais dans le voyeurisme. Ce qu’il montre, de manière évidemment romancée, n'est que la triste réalité, la monstruosité d'un système social qui considère la différence comme une tare.

Captives a été produit par Prélude avec France 2 Cinéma. Les ventes internationales du film sont assurées par Elle Driver. En France, il sortira le 7 février 2024 avec Wild Bunch.

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(Traduit de l'italien)

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