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BERLINALE 2024 Forum

Critique : The Wrong Movie

par 

- BERLINALE 2024 : Le film de Keren Cytter, expérimental dans sa forme et bizarrement captivant, pourrait être décrit comme une tragédie beckettienne pour l'ère du numérique

Critique : The Wrong Movie
Elijah Lajmer, Edward Baker et Laura Hajek dans The Wrong Movie

Pour un film qui a coûté 25,000 $, le titre The Wrong Movie pourrait à première vue avoir l’air d’un alibi. C’est en réalité une bonne description pour cette œuvre formellement expérimentale et étrangement satisfaisante par la scénariste, réalisatrice et monteuse Keren Cytter, née à Tel Aviv et basée à New York City. Le film, qui vient de faire sa première mondiale dans la section Forum de la Berlinale, consiste d’une série de vignettes dont le ton change constamment, et qui peut donner au spectateur l’impression, au fil des scènes, de s’être trompé de film.  

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Se déroulant entièrement dans une série d'appartements ordinaires, il peut aussi être décrit comme un travail de surréalisme “kitchen-sink”. Il commence avec un gros plan sur les fesses d’un homme vêtu de sous-vêtements blancs et unis. Mais ceci n’a rien de sexuel; le directeur de photographie Alex Huggins dirige sa caméra sur des parties de corps tout au long du film, suivant parfois le regard d’un personnage et d’autres fois dirigeant simplement l’attention du spectateur. 

L’homme vu au début du film est Alex (Jordan Raofpur), qui s’assoit pour enregistrer une “unboxing video” ou vidéo de déballage pour un nouveau drone. Mais il passe très vite à une confession et commence à parler de ses problèmes d’addiction et de la mort de son père cinq ans auparavant, ainsi que du soutien qu’il a reçu de sa petite amie Angel (Laura Hajek). Puis celle-ci apparaît dans l’appartement. Elle est venue récupérer sa cocotte minute. Le film change soudainement de ton, passant du fantaisiste au sentimental (la bande sonore créative et multi-genre par Dan Bodan guidant ces changements), et l’on apprend qu’ils sont séparés. 

Suivie par le drone d’Alex, Angel ramène sa cocotte minute chez elle et enregistre un food vlog (une vidéo culinaire), et quand le drone apparaît dans sa fenêtre, son visage s’illumine et elle le regarde avec amour. Elle se rend ensuite chez son nouveau petit ami. Joué par Elijah Lajmer, John est un autre drogué et un acteur en herbe. Et le drone continue ainsi de se montrer.  

Nicole (Ashby Bland), suicidaire, vient d’incinérer son père. Rob (l’artiste multimédia John Verdil) est un homme de ménage qui arrive chez elle, admet qu’il était une fois accro au sex, puis cite la Bible. Dans la salle de bain, Nicole semble communiquer avec un voisin à travers la cuvette de ses toilettes, d’où émergent des papillons. Plus tard, Nicole rend visite au dealer Timor (Edward Baker), qui vit avec sa mère (la chanteuse Devery Doleman), laquelle le décrit comme étant un bon garçon bien que moins bon que son frère Alex. Pendant ce temps, après avoir fumé de l'héroïne, Nicole et Timor considèrent l’idée de tomber amoureux, puis changent d’avis.

À part Alex, tous ces personnages semblent être voisins (même si le drone d’Alex est toujours dans les environs), du moins il est certain que Nicole et Angel vivent dans le même bâtiment. Mais plus intéressant que ces détails est l’approche formelle cryptique et joueuse de Cytter : les acteurs semblent souvent être simplement en train de réciter leur dialogue comme dans une répétition de lecture, ou bien ils parlent des spectateurs. Ces aspects brechtiens sont complémentés par des cadrages qui rappellent parfois la manière dont Woody Allen s'adresse au public, mais du point du vue de l'atmosphère plutôt que du récit. 

Comme un drama de Beckett pour l’ère digitale, The Wrong Movie traite de questions existentielles telles que les sensations de deuil et de solitude dans un monde constamment connecté. Mais le film est loin d'être trivial ou redondant — il y a beaucoup de choses à trouver entre les lignes de cette œuvre à première vue simple mais en réalité plutôt complexe. Le film peut sembler “wrong”, mais la plupart du temps, il fait les choses bien. 

The Wrong Movie est une coproduction entre A.P.E art projects era (États-Unis) et LLS Paleis art space (Belgique).

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(Traduit de l'anglais)

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