18/08/2023 - Dans son deuxième long-métrage, Christina Ioakeimidi livre une étude maîtrisée et touchante de l'amour chez les jeunes

Lors d’une des notoires vagues de chaleur qui frappent régulièrement Athènes, Eleftheria (Aggeliki Beveratou, pour la première fois à l’écran), 16 ans, et sa grande sœur Alexandra (Katerina Zisoudi) partagent un appartement. Les locaux ont rarement l’air conditionné, donc les fenêtres sont grandes ouvertes et les rideaux tirés, mais la mélancolie poisseuse de la fin de l’été se ressent à l'image. Medium [+lire aussi :
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interview : Christina Ioakeimidi
fiche film], le deuxième long-métrage de Christina Ioakeimidi, en lice pour le Cœur de Sarajevo de la compétition principale du Festival de Sarajevo cette année, est une variation au ralenti sur le thème du récit dd’apprentissage. Le nom d'Eleftheria signifie peut-être liberté, mais elle se sent coincée, entre le deuil de sa mère, décédée récemment, l’adaptation à la nouvelle famille de son père et la grossesse de sa sœur, qui est dans sa phase finale (c'est d'ailleurs pour cela que la jeune fille a quitté temporairement le nord de la Grèce pour être avec elle à Athènes).

Comme étude de personnage, Medium parvient à maintenir une saine distance entre son héroïne adolescente et une compréhension plus nuancée du monde géré par les adultes. Ce que ceci implique, c'est une narration fondée sur les émotions, bien soulignée par le travail caméra à l'épaule de Petros Noussias, qui suit Eleftheria et se confronter à elle quand c’est nécessaire. Sur une durée de temps assez compacte (la fin des vacances d’été), dans un lieu étranger (la capitale grecque comme foyer de remplacement), restreinte par le triangle d'obligations sus-mentionné, elle décide de s’évader. Passer du temps avec son voisin Angelos (Nikolakis Zeginoglou), un étudiant en médecine de 26 ans, est ce qui va bouleverser son univers. Leur amourette se développe très délicatement, jusqu’à exploser dans des moments de glorieuse impermanence. Ce jeune amour, authentique, indescriptible, a bien sûr un prix. Le soir, tard, elle fait le mur, abandonnant sa soeur et ignorant son père, car elle préfère habiter l’inconnu avec Angelos.

Cependant, même ce qui semble simple est forcément plus compliqué que ça. Un coup d'oeil sur la vie d'Angelos suggère qu’il vient d'un foyer brisé, qu'il a un ancien partenaire de sexe masculin et, curieusement, une amie médium. Anna (Martha Fritzila) fait l'effet d'être un personnage incroyable avec une histoire de fond riche, mais elle n'a pas droit à beaucoup de temps d’écran. La vie luxueuse mais traumatisante d’une excentrique diseuse de bonne aventure devient un sujet qui rapproche le jeune couple. Même s’il est suggéré qu’Eleftheria elle-même pourrait bien avoir le don et être médium, ce fil de l’intrigue est traitement en oblique, de sorte qu'il constitue une distraction et n'aide pas le film. De fait, le titre du film colle davantage à la position médiane de l'héroïne, prise entre les histoires de tous les autres, qu'il n'a de lien direct avec le surnaturel.

Medium est le deuxième film de Ioakeimidi après Harisma (2010), mais le temps qui s'est écoulé entre ces deux travaux n'a fait qu'affûter sa sensibilité de réalisatrice. Beveratou et elle parviennent bien à rendre la manière incertaine mais cependant déterminée dont une jeune fille amoureuse évolue dans le monde, la tête haute. En même temps, elle s’autorise à montrer cette vulnérabilité à laquelle on ne succombe qu’une fois dans sa vie : la première fois. Medium arrive à mitiger les mécanismes de l'identité en formation via l'amour qui soutient, le coeur qui se brise et la solitude, pour livrer un film bien fait, assez lâche dans son déploiement, ce qui colle bien au sujet, sur une jeune fille qui cherche à survivre à sa première histoire d’amour.

Medium a été coproduit par Ekso Productions (Grèce) et Red Carpet (Bulgarie). Les ventes internationales du film sont gérées par Wide Management.

(Traduit de l'anglais)