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VENISE 2023 Giornate degli Autori

Critique : L’avamposto

par 

- VENISE 2023: Edoardo Morabito suit les péripéties d'un rêveur hors du commun, étouffé par un torrent de contradictions et une mégalomanie qui le transforme en une caricature de lui-même

Critique : L’avamposto

Pour son deuxième long-métrage, L’avamposto [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Edoardo Morabito
fiche film
]
, présenté en séance spéciale aux Giornate degli Autori de la 80e Mostra de Venise, Edoardo Morabito a décidé de suivre les péripéties de Christopher Clark, un éco-guerrier écossais qui a consacré sa vie à la protection de la forêt amazonienne. De l’intérieur du "poumon vert du monde", Chris ne cesse de concevoir des projets qu'on pourrait qualifier de fous pour alerter l’opinion publique sur l’imminent désastre écologique. Son objectif est de pousser le gouvernement brésilien à instituer des réserves naturelles qui puissent permettre de préserver la forêt (hélas, en partie seulement).

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Ce que Morabito nous montre est la dernière tentative désespérée de Clark de se faire entendre. L’idée qui bouillonne dans son esprit est d’organiser un concert des Pink Floyd au cœur de la forêt amazonienne, pour convaincre le gouvernement brésilien d’agir. Ce qui ressort dès le début du film, c’est l’extraordinaire obstination de son sujet, sa capacité de s’accrocher à des bribes de réalité qu'il rassemble pour les transformer en certitudes. Même si ce qu'il raconte paraît de plus en plus "étrange" : connaît-il vraiment David Gilmour ? Comme pense-t-il, concrètement, recueillir des fonds suffisants pour mettre sur pied un tel projet ? Ce n'est que quand les commentaires du réalisateur, exprimés avec insistance en voix off, deviennent très présents que la réalité, du moins telle que Clark la présente, se met à vaciller.

Comme nous, le réalisateur découvre la personnalité complexe de son héros pendant le voyage entrepris ensemble jusqu’à son avant-poste, une communauté qu'il a fondée au cœur de la forêt amazonienne. Clark a créé cette réserve pour permettre aux peuples indigènes qui habitent dans la forêt (souvent impliqués dans des trafics illicites mais lucratifs qui n’ont pas grand-chose à voir avec les préoccupations écologiques du héros) de "vivre dignement", pour reprendre ses mots. Selon le raisonnement de Clark, ceci devrait les amener à ne pas détruire leur terre. Celle que rêve notre héros rêve : une société socialement équilibrée où l’homme vit en harmonie avec la nature qui se révèle cependant, avec le passage des ans, être une chimère. Avec l'arrivée du confort naissent en effet les jalousies, et le désir de richesse prend le pas sur l’harmonie préconisée par son fondateur. Bien que la défaite soit désormais évidente, notre personnage ne perd pas espoir, au contraire, il se lance dans l’aventure de sa vie : l’organisation d'un méga concert à la hauteur ce qui est en jeu, à savoir la destruction du "poumon vert du monde".

Mais qui est vraiment Chris Clark ? Un fou ou un prophète ? Voici les premières questions que le réalisateur se pose, manifestant clairement ses doutes par rapport aux véritables intentions de son héros. En voyage vers l'avant-poste personnel de Clark, parmi des caïmans "inoffensifs" (selon l’expérience du héros) et les dangers de toutes sortes qui guettent, on entend nettement le réalisateur se demander s’il était bien judicieux de mettre sa vie entre les mains d’un héros résolument d'une autre époque, qui n'a manifestement aucune conscience de ses limites. Ce qui est certain, c’est que ce n'est qu'en le suivant qu'il pourra mesurer qui cet homme, qui se cache derrière le sauveur sans reproche.

Ce qui rend L’avamposto si spécial, ce sont justement les commentaires hors-champ du réalisateur, qui sont parfois vraiment très directs, quasi violents, et ne laissent aucun doute quant à la nature de Clark. Qui exploite qui, ici ? Morabito en essayant de s’approprier le rêve de son héros ou Clark, qui  se sert ni vu ni connu du budget du film pour concrétiser son projet ? Parti du désir de dessiner le portrait d’un personnage hors du commun, le film se transforme en une réflexion sur le concept de salut, sur le besoin qu'a tout un chacun de fuir l'épouvantable réalité qui est la sienne.

L’avamposto a été produit par Dugong Films avec Rai Cinema. Les ventes internationales du film sont gérées par Intramovies.

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(Traduit de l'italien)


Galerie de photo 04/09/2023 : Venise 2023 - The Outpost

10 photos disponibles ici. Faire glisser vers la gauche ou la droite pour toutes les voir.

Edoardo Morabito, Irma Vecchio, Fernando Meirelles, Micaela Fusco, Marco Valerio Fusco, Giancarlo Cammerini
© 2023 Isabeau de Gennaro for Cineuropa - fadege.it

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