23/11/2023 - Ce premier long-métrage par Zara Zerny est un documentaire émouvant qui parle d'amour et de mort, et le fait superbement, avec une sincérité frappante

C'est devenu de plus en plus dur, ces derniers temps, de trouver des films qui emploient langage cinématographique simple mais parviennent à transmettre des émotions puissantes tout en abordant des sujets universels comme la mort et l'amour, le tout sans jamais tomber dans tout un attirail rhétorique. Disons-le sans ambages : le premier long-métrage de Zara Zerny, Echo of You [+lire aussi :
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fiche film], est de ces joyaux rares. C'est sans nul doute un des meilleurs documentaires qu'on ait pu voir en festival cette saison.

Le film, qui a fait sa première mondiale dans la section Luminous de l'IDFA cette année, s'intéresse à un groupe d'octogénaires danois, des hommes et des femmes. Ils ne se connaissent pas, mais ont tous perdu la personne qui partageait leur vie. À travers des interviews bien structurées, ils se mettent, chacun son tour, à dévoiler leurs pensées sur la vie en couple et leurs défunts chers et tendres. lls abordent tout une gamme de sujets : comment ils se sont rencontrés, ce qu'ils ont aimé l'un chez l'autre, les petits détails dans leur vie quotidienne ensemble, mais aussi des aspects plus sombres de leur relation comme les infidélités, la nécessité de faire des choix difficiles et les moments d'adversité.

Le documentaire de Zerny n'est cependant pas qu'un assemblage de têtes parlantes. Les paroles des sujets sont accompagnées d'images abstraites, rêveuses, et de scènes poétiques où ils interagissent avec leurs souvenirs, souvent à travers de vieilles vidéos ou photographies projetées sur un mur. Bien que le film réunisse un nombre conséquent de sujets (neuf en tout), la direction de Zerny et le montage soigneux de Sofie Steenberger donnent à chacun le temps d'écran qu'il faut. On apprend à les connaître assez bien pour reconnaître (et se rappeler tout du long) leurs milieux, le type de vie qu'ils mènent (ou ont menée) et la personne qui a partagé leur vie.

Parler est pour eux à la fois douloureux et cathartique. Leurs sentiments et émotions sont très visibles à l'écran, et touchent le coeur à plein. Des dizaines et des dizaines de beaux moments et de révélations jaillissent de leurs témoignages, et on s'y rapporte énormément. Par exemple, quand Rene achète des fleurs, il se retrouve toujours à imaginer quelle couleur aurait choisi sa femme si elle était encore là. Quand il regarde la télévision dans son salon, Peter sent encore la présence de sa femme, comme si elle était assise dans son fauteuil, à côté de lui. Quand il ouvre son placard, il sent encore son odeur.

Pour le spectateur, l'impact émotionnel de l'ensemble est décuplé par le paysage sonore créé par le compositeur Viktor Dahl et les ingé-son Teis Syvsig et Bobby Salomon. Les images impeccables filmées par Jacob Sofussen sont d'une beauté saisissante, surtout quand y apparaissent les visages des sujets, leurs maisons et leurs interactions avec leurs souvenirs. Son regard est intime, mais incroyablement respectueux.

Comme une grande cheffe d'orchestre, Zerny réussit à livrer un petit chef-d'oeuvre du documentaire, exploitant pleinement le potentiel de son équipe et choisissant un groupe de personnages qui nous apprennent beaucoup de choses sur le deuil et l'amour à travers les nombreuses expériences dont ils nous font part. Au-delà de ça, son approche narrative reste claire, linéaire et extrêmement attrayante, assez pour séduire un très vaste public couvrant plusieurs générations différentes.

La séquence finale donne le sentiment que ces neuf veufs et veuves ne font qu'un et que contre toute attente, ils essaient tous de continuer de vivre, tout en acceptant le fait que leurs blessures ne guériront jamais vraiment.

Echo of You a été produit par la société danoise Manna Film.

(Traduit de l'anglais)