11/12/2023 - Le film de Farah Nabulsi fait la lumière sur la situation politique en Palestine, et du même coup sur le contexte terrible des événements tragiques survenus ces derniers temps dans le pays

Farah Nabulsi, nominée aux Oscars pour son court-métrage The Present, se lance dans le long-métrage avec The Teacher, un thriller doublé d'un drame familial qui se passe en Palestine. Le film a fait sa première à Toronto en septembre et il vient de remporter le prix du meilleur acteur ainsi que le prix du jury au Festival international du film de la mer Rouge, en Arabie Saoudite, qui s’est terminé le 9 décembre (lire l'article).

Il est impossible de ne pas avoir en tête le changement drastique survenu entre ces deux festivals dans le contexte de ce film, qui tourne autour du conflit entre les Palestiniens et les Israéliens, surnommé par les personnages principaux "les colons". La situation présentée par Nabulsi, qui a également écrit le scénario du film, est celle d’une vie passée assis sur une bombe à retardement, qui vient maintenant d'éclater. Le personnage du titre, Basem (dans le rôle duquel Saleh Bakri subjugue), est un enseignant d'anglais au lycée qui sert aussi de mentor aux adolescents, tandis que sa propre vie de famille se désintègre. Adam (Muhammad Abed Elrahman) est un de ses élèves préférés. C’est un garçon calme, qui travaille dur, alors que son frère Yusuf (Mahmood Bakri) est bien moins diligent, et vient d’ailleurs de sortir de prison après une condamation pour avoir participé à une manifestation anti-Israël.

L’avenir est incertain pour ces garçons, qui voient un jour leur maison se faire démolir dans le cadre des activités de relocalisation officielles. En parallèle, un avocat américain affluent cherche son fils, soldat israélien, capturé par un groupe de résistance palestinien. Il a le soutien des médias et des autorités, alors que les jeunes garçons et hommes palestiniens ne peuvent compter que sur eux-mêmes, et s’appuyer les uns les autres, et qu'ils subissent constamment des injustices, comme le montre Nabulsi. Il y a aussi une volontaire britannique, Lisa (Imogen Poots), qui essaie d'aider Basem et Adam, tout en devenant émotionnellement très liée aux deux.

Le récit se concentre sur Basem et Adam, dont les vies sont définies par le conflit israélo-palestinien. Il est mu et par la colère, et par la douleur de tout ce qu'ils ont perdu. Nabulsi dépeint les abus de pouvoir systémiques et individuels dont ils ont été victimes, et ne laisse aux personnages comme au public pas une trace d'espoir que les choses changeront un jour. Cette partie du film est de loin la plus forte et fait presque écho aux tragédies shakespeariennes par le sentiment de ruine imminente qui l'habite. The Teacher parvient très bien à faire monter la colère et l’angoisse, quoiqu'il convienne bien entendu de se souvenir que le film ne présente qu'un côté de l'histoire du conflit.

L'interprétation renversante de Saleh Bakri, sa détermination, sa force intérieure et sa profonde compassion pour Adam sont sans conteste la force motrice qui porte The Teacher. Certaines parties de l’histoire sont problématiques. Par exemple, au moment où Nabulsi tourne son attention sur le relation de Lisa et Basem, on a l’impression de s'enliser dans des sables mouvants. Les conversations entre ces deux personnages font maladroites et parfois, elles sont même un peu illogiques et involontairement comiques.

En somme, The Teacher est un film politique fort qui se perd en chemin quand il devient personnel. Apparemment, l’amour et la colère ne vont pas bien ensemble.

The Teacher a réuni les efforts du Royaume-Uni, de la Palestine et du Qatar à travers les sociétés Cocoon Films, Native Liberty Productions et Philistine Films. Les ventes internationales du film sont assurées par Goodfellas.

(Traduit de l'anglais)