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CANNES 2024 Semaine de la Critique

Critique : Locust

par 

- CANNES 2024 : Dans ce premier long-métrage néo-noir du réalisateur américano-taïwanais KEFF, un jeune homme muet se retrouve en cheville avec des durs à cuire locaux

Critique : Locust
Liu Wei-Chen (au centre) dans Locust

Les tensions entre la Chine continentale et la Chine incluant les territoires contrôlés par elle se reflètent sur le marché du cinéma international. Dans les années 1990, les films les plus prestigieux d'Asie de l'Est étaient les films de la nouvelle vague taïwanaise et les productions plus portées sur le genre venues de Hong Kong. À présent, les premiers sont marginalisés et l'industrie du film de Hong Kong s'est largement contractée. La Chine continentale a en revanche connu un boum colossal, dans tous les secteurs de l’industrie : les titres nationaux ont le vent en poupe ainsi que le cinéma international, particulièrement hollywoodien.

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Locust [+lire aussi :
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, dont l'auteur porte le mononyme de KEFF, présenté à la Semaine de la Critique de Cannes, est un des films taïwanais les plus en vue sur la Croisette cette année, avec Mongrel [+lire aussi :
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, sélectionné à la Quinzaine des Cinéastes. Le récapitulatif ci-dessus était nécessaire pour planter le décor politique du premier de ces films, qui se passe principalement à Taipei pendant l’été 2019, quand les manifestations historiques à Hong Kong étaient partout partout dans les journaux, à la télévision et à la radio.

KEFF aiguise l'intérêt du spectateur en faisant planer dans l'air ces questions de solidarité nationale, de fierté et d’appartenance, mais l’histoire qu’il construit au premier plan n’est pas toujours à la hauteur de ces sujets. Cependant, le binarisme symbolique national est révélateur : la jeunesse de Hong Kong choisit de se soulever alors que celle de Taïwan opte pour le matérialisme et des activités de gangsters. Zhong-Han (Liu Wei-Chen) muet, travaille dans un modeste restaurant le jour et quand la nuit tombe, fait mystérieusement alliance avec une bande d'hommes de main de la mafia, les accompagnant dans leurs tournées de recouvrement de créances et leurs vols à main armée, plus élaborés. Le fait qu’il soit muet, à peine expliqué dans le film, est une bonne métaphore de cette complicité facile. De l'autre côté du détroit, les jeunes réclament à grands cris la démocratie et lèvent la voix à l’unisson pour défier le sytème en place.

Malgré sa sélection à une des compétitions cannoises, Locust est moins un film "d'art et d'essai" typique qu'on l'attendrait. Plus que ses visuels, qui font parfois un peu stériles, son scénario soigneusement composé et ses caractérisations théâtralisées sont les éléments qui doivent au cinéma commercial de Hong Kong : nous sommes dans un environnement fortement souligné où un type muet peut se parer d'un charisme étrange et héroïque, et où les attaques d'un gang cagoulé de noir sont chorégraphiées comme des danses de groupe. Zhong-Han a droit à une amoureuse, I-Ju, employée dans une épicerie, jouée avec sensibilité par Rimong Ihwar, qui l’adore bien qu’il ne soit capable de retourner aucun des mots qu’elle lui adresse. KEFF rend bien un sentiment romantique par ce choix excentrique, mais diminue aussi son travail en demandant à ces innombrables touches d'irréalité de s’accumuler de manière à former un tout assez lourd, dans sa structure et dans le ton adopté.

Le bail du lieu de travail de Zhong-Han, tenu par Rong (Yu An-Shun), las et vieillissant, a été acheté par un promoteur immobilier avec des connexions mafieuses. KEFF veut aussi montrer que la corruption va jusqu’en haut de l’échelle sociale, et tous les détails susmentionnés se mettent en branle pour montrer cela. Aucune séquence ou développement ici ne signifie ou ne respire par elle-même : chaque élément de ce film n'est qu'une pièce de la construction. Bien sûr, cette forme de récit très classique fonctionne parfois, mais ici, l'édifice n'a aucune fluidité ni aucune tension dramatique.

Locust est une coproduction entre Taïwan, la France et les États-Unis qui a réuni les sociétés Kindred Spirit et mk2 films. Les ventes internationales du film sont gérées par mk2.

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(Traduit de l'anglais)

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