Critique : Nasty – More Than Just Tennis
par Olivia Popp
- CANNES 2024 : Les Roumains Tudor Giurgiu, Tudor D. Popescu et Cristian Pascariu signent un docu sur Ilie Nǎstase qui cherche à humaniser (et immortaliser) une icône du tennis critiquée et aimée
Personne n'aura contribué à façonner ce qu'est le tennis aussi profondément que le joueur roumain Ilie Nǎstase, sembler suggérer le documentaire Nasty – More Than Just Tennis, dédié à la vie du maestro tennistique, mais le sous-titre du film contient une certaine ironie. Si le grand sportif voulait en effet être vu comme "plus que juste du tennis", on pourrait aussi le voir comme le tennis lui-même, si on songe à l'impact qu'ont eu son style de jeu et sa personnalité sur ce sport tel qu'on le connaît aujourd'hui, un exploit auquel aucun autre joueur ne pourra prétendre après que les règles du tennis professionnels aient été renforcées. Le documentaire, réalisé par Tudor Giurgiu (l'auteur de Freedom [+lire aussi :
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Les auteurs proposent un parcours très vaguement chronologique de la carrière de Nǎstase, qui est devenu célèbre sur la scène internationale après sa victoire au simple messieurs de l'US Open en 1972. Il est ensuite devenu le tout premier numéro 1 mondial au classement ATP informatique. Malgré son immense talent, il est surtout connu pour sa personnalité clivante, qui lui a valu à l'époque le surnom de “Nasty”.
Nǎstase a connu la gloire alors que le tennis était en pleine ascension. Alors, ni l'étiquette ni la conduite des joueurs n'étaient réglementées, et la fonction d'arbitre n'avait pas encore été professionnalisée. Avec Nǎstase, soudain, le tennis a cessé d'être un sport guindé réservé aux spectateurs riches pour devenir une forme de divertissement où les fans pouvaient encourager les joueurs de tous leurs poumons, siffler et huer. Son attitude sur le court, à la fois exaspérante et légendaire, faisait rugir le public et laissait ses adversaires bouche bée – on se souvient de la fois où il a abandonné sur le terrain la légende Arthur Ashe. De nombreux incidents impliquant Nǎstase ont fini par conduire à la rédaction de règles formelles ainsi qu'à de nombreuses règles informelles.
Les auteurs ont eu pour faire ce film un bel accès à des figures majeures du sport, notamment Björn Borg, John McEnroe, Billie Jean King, Rafael Nadal et Stan Smith. À partir des interviews, le film avance l'idée que malgré son caractère impétueux, sa personnalité chaleureuse en dehors du court était évidente – il a d'ailleurs facilement gagné l'affection d'adversaires qu'il avait descendus sur le terrain. Le partenaire de double de Nǎstase, Ion Țiriac, devenu ensuite homme d'affaires, est celui qui livre les témoignages les plus personnels sur les moments qu'ils ont passés ensemble, et révèle aussi à quel point son camarade est devenu la fierté du peuple romain. Le propos des auteurs est que Nasty a remis la Roumanie sur la carte mondiale, car grâce à lui, le public du monde entier a laissé de côté ses préjugés liés à la Guerre froide pour soutenir ce personnage fascinant.
Quoique le film soit conventionnel dans son style, il fait mouche. Les auteurs livrent un documentaire bien ficelé et chargé de tension, aussi chouette à regarder qu'un match contre Nǎstase. Des clips des moments les plus captivants de la carrière du joueur suffisent à mettre du conflit dans l'histoire, car on y voit bien les facéties de Nǎstase à l'oeuvre : il répond aux arbitres, conteste les observations des juges de ligne, provoque ses adversaires, crie des gros mots et fait des doigts d'honneur à pratiquement tout le monde, à la grande joie des spectateurs. La musique d'inspiration électro de Marius Leftǎrache coïncide étonnamment avec la techno indus de Challengers [+lire aussi :
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Nasty – More Than Just Tennis a été produit par la société roumaine Libra Films, en coproduction avec HBO Max et Televiziunea Română (TVR). Les ventes internationales du film sont gérées par Goodfellas.
(Traduit de l'anglais)
Galerie de photo 24/05/2024 : Cannes 2024 - Nasty
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