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LOCARNO 2024 Compétition

Critique : Salve Maria

par 

- Le troisième long-métrage de Mar Coll, qui observe de près la dépression post-partum, oscille entre drame féministe et thriller psychologique

Critique : Salve Maria
Laura Weissmahr dans Salve Maria

S'étant déjà spécialisée dans les relations familiales et l’émancipation féminine à travers ses films précédents, Three Days with the Family [+lire aussi :
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et We All Want What’s Best for Her [+lire aussi :
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, la Catalane Mar Coll livre avec Salve Maria [+lire aussi :
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interview : Mar Coll
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un récit encore plus intime où elle passe sous le microscope la palette d’émotions complexes d'une jeune mère par rapport à son nourrisson. Le film, qui vient de faire sa première en compétition internationale au Festival de Locarno, repousse les limites, ce qui est une autre caractéristique typique du cinéma de Coll. À partir du roman de la Basque Katixa Agirre, Mothers Don’t, le film adopte la perspective d’une mère qui a du mal à accepter son enfant et rend compte des pensées insidieuses qui la hantent tout au long de cet état peu familier pour elle et très solitaire. Le titre très pertinent de Salve Maria souligne l’héroïsme et le martyre du personnage-titre, complété par l’expression désolée et exténuée de l’actrice qui incarne le personnage du titre (Laura Weissmahr), tout en faisant passer une critique subtile de l’image idéalisée de la maternité que propose la religion catholique.

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L’intrigue suit l'aspirante écrivaine Maria, indissociable malgré elle de son bébé et sa poussette, dans toutes ses réactions excessives et ses angoisses, et sa bataille tranquille mais farouche avec les éléments pratiques du quotidien, exacerbée par le peu de sommeil qu’elle arrive à avoir pendant les premières semaines de la prochaine étape de sa vie. L'allaitement est douloureux, le bébé ne fait que vomir son lait (ce que personne ne voit comme un problème à part elle), les vieilles fenêtres en bois de l'appartement exigu où vit la famille ne se ferment plus et le père du bébé, toujours occupé, souvent absent, qui repousse constamment son congé paternité, ne trouve jamais le temps de les réparer. La vie d’une écrivaine, dont le monde intérieur intrigant et l'imagination intéressent le spectateur, est noyé sous la nécessité de s’occuper d’un être sans défense : son ego est mortellement blessé, et la possibilité que cette réalité morose finisse par tourner au cauchemar est accentuée par l'intérêt exagéré des médias pour l'histoire d’une femme française qui a noyé ses jumeaux de dix mois dans une baignoire. Maria devient obsédée par cette affaire et, comme dans les films hollywoodiens, se met à découper en secret des articles dans les journaux et à essayer de coucher sur le papier ses fantasmes les plus terrifiants, accompagnés de visions hallucinées de la distorsion de son corps. Au-delà de l’effet thérapeutique que cet exercice peut avoir, il semble marquer un tournant dans le film, qui de dramatique, glisse subtilement sur le terrain du thriller.

Malgré le scénario chargé de suspense, habilement coécrit avec Valentina Viso, et la manière magistrale qu'a la réalisatrice de transmettre les émotions volatiles de l’héroïne, ce qui semble totalement superficiel, c'est l’accent extrême mis par le film sur les symptômes au lieu de tenter d’analyser les raisons profondes de l’écroulement émotionnel du personnage, au-delà de l'évident manque de temps pour s'occuper d'elle-même qui l'affecte et des attentes placées autour de la maternité que nous impose la société. Il semble certes plus facile d’interroger la maternité elle-même au lieu d'examiner, par exemple, la logique consumériste de la vie moderne ou l’extrême narcissisme généralisé, qui font que l’acte naturel consistant à donner naissance à un enfant semble si peu naturel et que la période traumatisante qui suit (pourtant nécessairement turbulente, afin de permettre la transformation de l'existence qui résulte d'une naissance) est présentée comme un obstacle insurmontable. Ceci pré-détermine aussi le dénouement impulsif et immature du film, qui tente de "résoudre" le problème en mettant une distance entre mère et enfant au lieu d'aller vers une réconciliation, posant ainsi une couche de vernis sur le problème au lieu de l’aborder de manière plus profonde.

Salve Maria a été produit par les sociétés espagnoles Escándalo Films et Elastica Films. Les ventes internationales du film sont gérées par l’agence belge Be for Films.

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(Traduit de l'anglais)

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