01/09/2024 - VENISE 2024: Frédéric Farrucci délivre un palpitant western moderne dans le sillage d'un berger corse traqué par des mafieux et brillamment interprété par Alexis Manenti

"Tu es devenu une anomalie dans le paysage. Tu sais très bien comment ça finit, je ne vais pas te faire un dessin". Quand la source même de votre existence est menacée par de dangereux personnages, le choix est simple : se soumettre ou faire face à vos risques et périls. C’est la seconde option dans laquelle se précipite impulsivement le taciturne et têtu protagoniste du captivant second long métrage de Frédéric Farrucci, Le Mohican [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Frédéric Farrucci
fiche film], dévoilé au programme Orizzonti Extra de la 81e Mostra de Venise. Et nous sommes en Corse où nul ne manque de caractère dans un territoire gangréné par une criminalité naviguant entre affairisme balnéaire et mouvement clandestin indépendantiste.

"Ton terrain nous intéresse – Mais il n’est pas constructible ? – Ce n’est pas ton problème – Je travaille sur ce terrain ! – Des intérêts monstrueux sont en jeu, qui te dépassent". Surnommé "le dernier des Mohican" par un ami car il est le seul à encore garder son troupeau de chèvres en bordure du littoral, sur la presqu’ile de Santa Manza, le solitaire berger Joseph (un extraordinaire Alexis Manenti) est plus que préoccupé par la visite surprise de ces acheteurs potentiels qu’il connait bien. Car comme lui avoue un voisin qui a vendu : « on ne dit pas non à ces gens là ». Et de fait, ils sont bientôt de retour et armés. La situation dérape (« je suis devenu fou ») et Joseph s’enfuit dans le maquis après avoir laissé un mort sur le carreau. Le voici désormais recherché par la police et pourchassé par ses ennemis alors que sa nièce Vannina (Mara Taquin) mène l’enquête de son côté et entretient la légende de son oncle sur les réseaux sociaux…

Immergée dans les sublimes paysages de l’Alta Rocca sertis dans le scope de la chef-opératrice Jeanne Lapoirie, cette déclinaison contemporaine du classique combat de David contre Goliath est un haletant récit de survie ultra physique d’un homme qui n’a rien d’un héros mais qui le devient progressivement grâce à la caisse de résonance du monde numérique. Progressant au rythme du fugitif et de la musique composée par Rone, le scénario (écrit par le réalisateur) n’en aborde pas moins frontalement tous les problèmes qui minent une Corse où l’amitié et les racines valent leur pesant d’or même quand la mort guette. Ce combat déséquilibré dont l’issue est vitale pour l’avenir de l’île de Beauté sous l’emprise de la bétonisation du littoral sous perfusion touristique et de la criminalité organisée, Frédéric Farrucci réussit à en exposer tous les enjeux à travers un excellent film de genre rendant hommage au western et qui plaira sans aucun doute à tous les publics.

Le Mohican a été produit par Koro Films et coproduit par Atelier de production, Novoprod et Les Films Velvet. Be For Films pilote les ventes internationales.