Critique : L’orto americano
- VENISE 2024 : Le nouveau film de Pupi Avati est un thriller noir gothique totalement débridé, inquiétant et ridicule

Il serait assez difficile d'établir un bilan complet du nouveau film de Pupi Avati, intitulé L’orto americano [+lire aussi :
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On fait tout de suite la connaissance du personnage principal. Il s’agit d’un jeune psychopathe, aspirant écrivain, qui a toujours avec lui un album de ses parents morts (avec lesquels il converse souvent), interprété par Filippo Scotti. Dans la première scène, le jeune homme est chez le barbier et il a une très brève conversation avec une jeune infirmière de l’armée américaine, Barbara (Mildred Gustafsson). Les quelques secondes qu'ils passent ensemble vont suffire à faire naître chez notre héros une obsession pour la jeune fille, qu'il qualifie d'emblée de "femme de sa vie". Un an plus tard, par hasard (enfin par une manœuvre de scénario totalement forcée), il se retrouve à habiter seul dans le Midwest, dans une maison contiguë à celle de l’infirmière. La mère de cette dernière (Rita Tushingham) révèle que sa fille, qui se serait mariée avec un Italien, a mystérieusement disparu.
Le jeune homme se lance alors dans une odyssée surréaliste à la recherche de la fille. Il entend des voix, creuse la terre du potager de sa vieille voisine et cherche à trouver les traces de la jeune fille de manière erratique et exhaustive à la fois. Son enquête (et une entrée par effraction dans le domicile de quelqu'un) le ramène vite en Italie, où ses efforts continuent, incessants. L’histoire procède à un rythme expéditif, comme une errance ininterrompue. Si ce choix peut sembler à certains égards fascinant, il fait aussi paraître l'ensemble assez factice et peu justifié.
L'intrigue, dans la première partie au moins, parvient à intéresser suffisamment le spectateur. Hélas, par la suite, le niveau de suspension de l'incrédulité requis se met à monter vertigineusement, faisant tomber le film, par moments, dans l'incompréhensible et le comique involontaire. La scène qui se passe au commissariat de police (où on voit Andrea Roncato dans le rôle d’un maréchal des carabiniers résolu à recueillir une plainte du héros) est peut-être l’exemple le plus net du déclin graduel de l'échafaudage narratif à la base de l’œuvre.
Le film, entièrement tourné en noir et blanc (avec des inserts sporadiques de matériels d’archives qui marquent les principaux changements de temps et de lieu), souffre dans son ensemble d’une direction d’acteurs et d'une mise en scène plutôt dépouillée et peu inspirée. La bande originale composée par Stefano Arnaldi, certes bien exécutée en plus de renvoyer aux films noirs des années 1940 et 1950, pèche parfois par volonté de souligner l'action. En outre, la voix du personnage d'Arianna (Morena Gentile), clairement doublée en langue anglaise, manque d’authenticité par rapport aux autres. Le dénouement, résolument rocambolesque et énigmatique, ne répond qu'à une partie des questions soulevées au fil du film.
L’orto americano est une production entièrement italienne signée DueA Film, Minerva Pictures et Rai Cinema. Les ventes internationales du film sont gérées par Minerva Pictures.
(Traduit de l'italien)
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