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SITGES 2024

Critique : Par amour

par 

- Le deuxième long-métrage d'Élise Otzenberger, dont Cécile de France tient le rôle principal, est un drame familial mâtiné de mystère visuellement sublime, avec une touche délicate de récit fantastique

Critique : Par amour
de gauche à droite: Navid Zarrabian, Cécile de France et Darius Zarrabian dans Par amour

L'appel d’une sirène, un messages mystérieux d’un autre monde : il n'y a peut-être rien de plus mystique ou sublime que l'attrait de l’inconnu. Pas étonnant que les conteurs se tournent vers l’hyperespace et le vaste océan pour placer leurs personnages dans des environnements avec lesquels on n'est absolument pas familiers, même si cette aliénation est taillée sur mesure, pour correspondre aux limites d’un récit en particulier. Dans son deuxième long-métrage comme réalisatrice, Par amour [+lire aussi :
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, l’actrice française Élise Otzenberger choisit l’élément aquatique comme novum spéculatif pour faire pendant à un monde autrement réaliste à cela près que ses personnages semblent capables d’entendre les voix d'aliens à travers ce médium liquide. Le film, qui vient de faire sa première mondiale dans la compétition Fantastic du Festival de Sitges, est né d'une idée originale d'Otzenberger, développée en scénario par elle, Maud Ameline et Mauricio Carrasco.

Sarah (Cécile de France), qui vient de déménager hors de Paris avec sa famille, a des problèmes de couple avec son mari Antoine (Arthur Igual). Elle a deux jeunes fils, Louis (Navid Zarrabian), sept ans, et Simon (Darius Zarrabian, son frère), neuf ans. Lors d'un moment à la plage qui va changer le cours de choses, et qui constitue la magnifique scène d’ouverture du film, Simon est inexplicablement attiré par l’eau et prétend qu’il peut entendre les voix enchanteresses d’extraterrestres. Bien qu'elle soit d’abord sceptique, Sarah se met à encourager le comportement de son fils, ce qui lui met son mari à dos mais l'amène sur son propre chemin d’exploration des croyances et du mystère du monde qui l’entoure.

Les titres anglais des films en français tendent à saper la beauté conceptuelle de leurs titres originaux en faveur de quelque chose de plus littéral, et c’est aussi le cas de Par amour : le titre international est Call of Water (litt. "l’appel de l’eau"). Le langage visuel réaliste de la réalisatrice dit bien qu'il s'agit avant tout d'un drame familial d’une précision chirurgicale sur les liens entre Sarah, ses fils et son mari, puis seulement dans un deuxième temps d'un film à mystère avec des éléments plus fantastiques qui font partie du réalisme magique soigné d'Otzenberger. Il y a aussi un courant sous-jacent de symbolisme puissant derrière le métier de traductrice de Sarah : elle fait constamment allusion à un voyage qu'elle veut faire en famille en Chine, exprimant ainsi son propre désir ardent de s'aventurer dans un autre espace, ou monde.

C’est une joie de voir un tel film dans un contexte comme celui du festival catalan, où le fantastique plutôt réaliste côtoie des films de genre purs et durs, et bien plus cash dans leur démarche. Le scénario, net et précis, ne traîne jamais en longueur, de sorte que ce n’est pas un problème si que Otzenberger laisse le mystère central bien caché dans une boîte noire, pour n'en révéler que des filaments. Cependant, plus de prise de risque dramaturgique plus tôt dans le film aurait permis à l'idée de départ de davantage s'élever encore – car au bout du compte, ce n'est vraiment que dans le dernier tiers du film que l'esprit de Sarah elle-même se met à se disloquer. Là, Otzenberger joue enfin plus librement avec la situation de cette mère qui accepte ses propres instincts métaphysiques, mais le moment où notre héroïne serait embarquée dans quelque chose de beaucoup plus vaste que ses querelles familiales est un délicieux coup de théâtre qui ne vient jamais. Sarah accepte l’inconnu, mais hélas, on n'aura pas la chance de la voir poussée jusqu’à ses limites.

Quelque chose de sublime plane de tous les côtés de l'histoire et à travers toutes les composantes cinématographiques du film. La musique orchestrale évoquant Hans Zimmer composée par l’artiste français indépendant Robin Coudert alias ROB (connu pour avoir mis en musique la série Le Bureau des légendes [+lire aussi :
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d'Alexandre Aja) accompagne en beautée les images magnifiques de Ludovic Zuili, qui passent de plans aériens balayant tout l’océan et la plage à des gros plans sur les yeux bleus limpides de Cécile de France. Indéniablement, ce travail d'Otzenberger est splendide à regarder, mais on en sort sans avoir été pleinement assouvi, car le film n'exprime jamais pleinement son potentiel.

Par amour a été produit par la société française Mamma Roman. Les ventes internationales du film ont été confiées à Playtime.

(Traduit de l'anglais)

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