Critique : BXL
par Aurore Engelen
- Les frères Ish et Monir Ait Hamou s’inspirent de leur enfance pour dresser le portrait de deux frères d’un quartier populaire de Bruxelles

Dévoilé en première mondiale au Film Fest Gent le premier long métrage de Ish et Monir Ait Hamou, BXL [+lire aussi :
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fiche film], plongée dans le quartier de leur enfance, au plus près de deux frères qui tentent de concrétiser leurs rêves. Ish Ait Hamou s'est fait connaître en tant que chorégraphe, mais aussi comme écrivain. Ses deux premiers romans, Hard Heart et The Beauty We Share ont rencontré un beau succès auprès du public flamand. Monir Ait Hamou est comédien depuis une petite vingtaine d’années. En 2009, il est l’un des Barons [+lire aussi :
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BXL raconte donc l’histoire de Tarek (Fouad Hajji), 26 ans, et Fouad (Yassir Grief), 12 ans. Le premier, employé dans une usine de conditionnement, et champion de MMA, rêve de s’émanciper par le sport. Le second, jeune garçon fragilisé par un évènement traumatique, tente de surmonter avec courage et légèreté les vicissitudes de l’adolescence. Le film débute sur La Valse à mille temps de Jacques Brel, dans une friterie où l’on prépare dans le détail une mitraillette, sandwich signature des snacks bruxellois, une accroche efficace qui plante d’emblée le décor. Alors que l’on suit un jeune garçon à vélo qui s’apprête à livrer la mitraillette à son copain, on explore les rues de ce quartier bruxellois, entre Molenbeek et le centre populaire de Bruxelles, alors que s’affichent tweets et autres citations (du Président du parti socialiste flamand à Donald Trump) qui illustrent le racisme décomplexé des politiques vis-à-vis de la communauté d’origine marocaine de la ville. Le ton est donné, celui d’un cinéma populaire à visée sociale, dont on pressent, malgré l’apparente légèreté, l’ombre dramatique qui plane sur l’histoire.
Et effectivement, alors que Tarek rêve d’Amérique, et que Fouad est secrètement amoureux de la jolie fille de sa classe, un engrenage fatal se met en route. On s’attache évidemment à leur parcours, Tarek le grand frère renfermé et travailleur, qui prend soin de sa mère et de son cadet depuis que le père les a abandonnés. Fouad, l’adolescent qui ne demande qu’à mordre la vie à pleines dents, mais qui peine à se remettre du traumatisme laissé par une perquisition plus que musclée à son domicile dans la foulée des attentats de mars 2016, perquisition menée par erreur dans le mauvais appartement, auprès de la mauvaise personne. Le film d’ailleurs dresse un constat sans appel de la peur qui sévit chez ces jeunes hommes, redoutant les contrôles de police arbitraires qui émaillent leur quotidien. Ce climat de tension crée un terreau fertile pour les embrigadements en tous genres, et c’est un combat constant que de rester sur le droit chemin. Le message qui semble tenir à coeur aux frères Ait Hamou prend cependant le pas sur les personnages eux-mêmes aux deux tiers du film, et on peut regretter que Fouad, Tarek et Sofia, la petite amie de ce dernier, deviennent presque des circonstances du récit, au service d’une dénonciation certes légitime et surement nécessaire mais si appuyée qu’elle semble sacrifier les personnages que le film avait pourtant pris le temps d'installer.
BXL est produit par Potemkino (Belgique), en coproduction avec Untold Stories (Belgique). Paradiso sortira le film dans les salles belges le 22 janvier 2025.
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