Critique : Milano
par Aurore Engelen
- Christina Vandekerckhove met en scène un duo émouvant unissant un adolescent malentendant et son père parfois dépassé par la situation
Le Film Fest Gent dévoile en avant-première Milano [+lire aussi :
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fiche film], premier long métrage de fiction de la cinéaste flamande Christina Vandekerckhove, présenté en séance spéciale. Active au théâtre et à la télévision, la réalisatrice se fait remarquer en 2017 avec son documentaire Rabot [+lire aussi :
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fiche film], qui lui vaut notamment le Prix du public au Film Fest Gent et le Ensor du Meilleur documentaire.
Avec Milano, elle explore la relation complexe qui unit un père et son fils. Milano (Basil Wheatley) est tout juste adolescent. Malentendant, il semble vivre dans son monde, partiellement coupé des autres, et notamment de son père Alain (Matteo Simoni). Si l’amour qui les unit ne fait aucun doute, il y a comme une distance qui les sépare. Cette distance correspond peut-être à une absence, celle de la mère de Milano, jeune femme perdue qui a fui la parentalité dès son plus jeune âge. Alain de son côté trime pour joindre les deux bouts, il multiplie les petits boulots, déterminé à ce que son fils ait une meilleure vie que lui, au point souvent de s’abrutir à la tâche.
Mais la simple volonté ne suffit pas toujours à échapper à son milieu. En quête d’une figure maternelle qui se refuse à lui, Milano se réfugie auprès de Renée (Alexia Depicker), une quarantenaire célibataire et sans enfants, riche d’argent mais pauvre d’amour, qui voit dans le jeune garçon un moyen de réchauffer un quotidien fait de solitude.
A l’extérieur, les éléments grondent et la tempête se lève alors que le drame monte en puissance. Face à de tels traumas, comment trouver la résilience ? Comment convaincre Milano de dépasser le mutisme auquel il s’astreint, et qui rend son père fou d’impuissance ? Le scénario distille les éléments dramatiques (un trafic de drogue, un jeune voisin cruel, un petit chien qui sert de refuge à Milano) qui laissent entrevoir la fatalité à l’oeuvre. Le personnage de Renée, dont les origines de la relation avec Milano et son père ne sont jamais clarifiées, illustre de façon un peu appuyé le destin de classe qui semble condamner d’avance Milano, et le contraste entre son environnement et celui du garçon flirte avec un certain misérabilisme.
On retiendra néanmoins le beau portrait que dresse le film de Milano, et la façon dont il donne accès à son univers sensoriel, à travers la représentation à l’écran de sa surdité, grâce à un sound design qui laisse capter dans quelques scènes la vérité du garçon quand il ôte le filtre que constituent ses aides auditives. On notera également la belle performance du jeune Basil Wheatley, dont c’est le premier film, efficacement épaulé par Matteo Simoni, toujours très juste, et Alexia Depicker, elle aussi convaincante, qui donnent ainsi du corps à leurs relations, malgré l’aspect un peu stéréotypé des différences de classe sociale qui les séparent.
Milano est produit par Lunanime (Belgique), et coproduit par Bastide Films (Pays-Bas) et Dragons Films (Belgique). Les ventes internationales sont assurées par Best Friend Forever. Le film sortira le 6 novembre prochain en Belgique, distribué par Lumière.
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