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IFFR 2025 Compétition Big Screen

Critique : The Assistant

par 

- Wilhelm et Anka Sasnal proposent une lecture art et essai d'un roman de Robert Walser, paru en 1908, en usant d'éléments anachroniques pour que le spectateur s'interroge sur la situation du personnage

Critique : The Assistant
de gauche à droite : Piotr Trojan, Agnieszka Żulewska et Andrzej Konopa dans The Assistant

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d'Albert Oehlen, cette édition de l'IFFR propose un autre film en lien avec les beaux-arts, qui fait sa première mondiale dans le cadre de la compétition Big Screen : The Assistant [+lire aussi :
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, coréalisé par le couple formé par le peintre et artiste plasticien polonais Wilhelm Sasnal et sa femme monteuse et scénariste Anka. Les Sasnal adaptent ici le roman Le commis de Robert Walser (1908) et présentent l'histoire sinueuse de ce héros alors qu'il travaille pour un inventeur et homme d'affaires irresponsable. La sensibilité littéraire du matériel-source dont Wilhelm Sasnal a fait un scénario se fait fortement sentir dans le commentaire que l’histoire formule sur les divisions de classes et les liens formés par nécessité.

Joseph Marti (Piotr Trojan) trouve ici un emploi d’assistant logé, nourri, blanchi pour un inventeur très particulier, Tobler (Andrzej Konopa), qui ne souhaite rien plus que trouver des investisseurs pour ses créations, qui comprennent des horloges modèles uniques et des ouvre-boîtes. Sachant qu’il perdra son travail et son logement si Tobler échoue, Marti reste pour l'emploi et la bonne chère, et voit une affaire après l'autre leur passer sous le nez. Marti développe aussi une relation complexe avec la femme de Tobler (Agnieszka Żulewska) : il compatit avec elle devant la dureté de Tobler tout en restant, dans le même temps, dégoûté par ses privilèges. À mesure qu'il voit Tobler refuser de payer ses anciens employés et défouler sa colère sur sa femme et lui-même, notre personnage central prend conscience de la complexité de cet environnement domestique. Les relations dans la maisonnée sont de plus en plus froides et on lui demande des choses de plus en plus étranges, ce qui fait de lui plus un majordome qu’un assistant.

Wilhelm Sasnal s’est occupé de la photographie du film, qui a forcément un côté très film en costumes et dégage une nette volonté artistique, apparente dans le grain de l'image et les mouvements rôdeurs de sa caméra, bien complétés par le travail historiquement rigoureux qu'a fait Ewelina Gąsior au niveau des décors. En tant que chef opérateur, Wilhelm Sasnal a recours à quelques zooms très délibérés qui secouent le spectateur aux moments où il pourrait se laisser glisser dans une douce rêverie. Cependant, comme on passe très peu de temps, voire aucun, avec le monde intérieur de Marti, on a du mal à se sentir connecté avec lui d'une manière qui serait significative et à comprendre pourquoi il est si dévoué avec son nouvel employeur.

L’élément qui fait le plus réfléchir dans ce film, c’est le fait que ses auteurs extraient l’histoire du passé en ajoutant un certain nombre d'éléments musicaux anachroniques et de scènes qui suggèrent que l’histoire de Marti doit être entendue comme un récit allégorique. La bande originale, riche en airs joués au synthétiseur et, plus tard, en passages à la guitare électrique et en morceaux de rock alternatif, amène à penser au-delà de l’environnement social de l’histoire. Dans un moment qui s'étire au-delà du réel du film, Marti essaie même de convaincre la femme de Tobler que l’ouvre-boîte aura du succès en annonçant qu’il va être produit et utilisé en masse pendant deux énormes guerres mondiales qui commenceront respectivement en 1914 et en 1939. Cependant, The Assistant, qui tel quel dure deux heures, aurait facilement pu être écourté, pour un effet qui en aurait peut-être été augmenté, les scènes moins réalistes prenant une place trop centrale dans ce conte qui requiert à la fois une intrigue cartésienne et une grosse dose de réflexivité.

The Assistant est une production entre le Royaume-Uni et la Pologne qui a réuni LunaFilm et la galerie d'art contemporain Sadie Coles HQ. Les ventes internationales du film ont été confiées à Lights On.

(Traduit de l'anglais)

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