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SXSW 2025

Critique : The Home

par 

- Le film d'horreur modeste mais efficace de Mattias J. Skoglund exploite pleinement une des plus grandes angoisses de notre époque : celle de devoir aller vivre en maison de retraite

Critique : The Home

Il va sans doute devenir difficile de trouver une personne qui ne devra pas, à un moment ou un autre, aller vivre dans un établissement pour personnes âgées dépendantes, car les gens vivent plus longtemps et leurs familles, s'ils en ont, sont souvent éparpillées. C'est une pensée terrifiante qui a déjà été explorée dans plusieurs documentaires bien intentionnés, et qui constitue une nouvelle tendance intrigante dans le cinéma d'horreur.

The Home [+lire aussi :
interview : Mattias J. Skoglund
fiche film
]
de Mattias J. Skoglund, projeté cette année au festival SXSW dans la section Midnighter, s'inscrit dans la lignée de titres comme le film polonais Night Silence (2024) : il se passe dans une maison de retraite où rien n'inspire confiance, de ses éclairages affreux aux derniers petits objets personnels, rescapés de maisons vendues à la hâte, en passant par les pensionnaires eux-mêmes, avec leurs regards vides car ils n'attendent plus rien. Le film est efficace pour ce qui est de faire sursauter le spectateur, mais il y a une autre raison qui explique pourquoi cette nouvelle vague de longs-métrages d'épouvante a autant de succès : ils peuvent être très effrayants, mais aussi touchants.

On ne peut pas, quand on raconte ce genre d'histoire, éviter la solitude ou la souffrance. Quand Joel (Philip Oros) revient dans sa maison d'enfance après que sa mère, Monika (Anki Lidén), ait fait une chute dans sa cuisine, ce qui suit est reconnaissable et vous brise bel et bien le cœur : au sentiment de culpabilité d'un des enfants fait pendant l'indifférence brutale d'un autre, tandis que la mère âgée est désorientée et pleine d'angoisse à l'idée de quitter sa maison. "Vous allez vraiment me laisser là ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal ?", demande Monika à Joel. Le simple fait que ces mots reviennent tout le temps est probablement l'élément le plus terrifiant du film.

Cependant, on trouvera ici plus que de simples réflexions sur le sentiment de responsibilité des gens et le vieillissement de nos sociétés. Le mère de Joel n'est pas torturée que par son esprit vacillant : feu son père, un homme violent, la hante et semble ne pas vouloir la laisser en paix. Cet élément ajoute un autre niveau de lecture à l'histoire, lié au traumatisme durable que cause la violence domestique, qui remonte toujours à la surface malgré les efforts des familles pour l'occulter.

C'est l'enfer, là-dedans, mais l'extérieur n'est pas beaucoup mieux. Rien n'inspire confiance dans cette ville : les gens vivent bloqués dans le souvenir de leurs beaux jours, un peu comme Joel, qui traverse une mauvaise passe, ou dans des relations qui ont l'air saines sur le papier, mais vous rongent l'amour propre. Skoglund à l'œil pour déceler l'absurde ou trouver le terreur dans les choses les plus ordinaires. Même l'ancienne chambre de Joel quand il était petit vous fait frissonner, principalement à cause d'un vieux poster de Kanye West sur son mur. Le réalisateur n'a pas peur de s'engager sur des terrains inconfortables, de faire allusion à la sexualité des seniors ou à la cruauté. Bizarrement, on ne peut s'empêcher de penser à Excelsis Dei, un vieil épisode de X Files qui se passait dans le même genre d'endroit et qu'on n'arrive toujours pas à oublier, des années après.

Même les acteurs secondaires de The Home livrent des interprétations de premier ordre et font des merveilles avec de courtes répliques. "J'ai un enfant qui ne veut plus me voir", dit quelqu'un pendant qu'une autre pensionnaire repète sans arrêt la même phrase, héritée de son passé de secrétaire – après des années de vie, c'est tout ce qui reste. Quand Monika, assez diplomate, affirme “c'est un endroit charmant, mais ce n'est pas pour moi", on se dit aussi que prendre ses jambes à son cou semble la meilleure option. Sauf que les corps et les esprits de ces vieilles personnes ne leur permettent plus de choisir, et de toute façon, personne n'écoute plus leurs plaidoyers. The Home s'avère être un film d'horreur étonnament dévastateur et extrêmement efficace qui, contrairement à ses pauvres personnages coincés en EHPAD, promet de faire du chemin.

The Home a été écrit par Mattias J. Skoglund avec Mats Strandberg, et produit par Siri Hjorton Wagner pour [sic] film (Suède), Three Brothers (Estonie), Compass Films (Islande), avec le soutien du Gotlands Filmfond et de la Sveriges Television. Les ventes internationales du film sont gérées par LevelK.

(Traduit de l'anglais)

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