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VISIONS DU RÉEL 2025

Critique : The Mountain Won’t Move

par 

- Petra Seliškar observe la vie de trois frères bergers entourés de leurs moutons, leurs vaches et leurs chiens, dans les monts Šar, en Macédoine du Nord

Critique : The Mountain Won’t Move

D’habitude, les projets de documentaires passent plus de temps en développement et en production que ceux de fiction. Présenter deux films documentaires à deux mois d'intervalle à des festivals réputés est rare, mais c'est ce qui est arrivé à la réalisatrice slovène Petra Seliškar cette année. Après la première de son moyen-métrage My Summer Holiday au FIPADOC en janvier, la réalisatrice est à présent à Visions du Réel avec le long-métrage The Mountain Won’t Move. Ce n’est cependant pas une coïncidence, parce que les deux films ont en commun leurs personnages, leur lieu de tournage et leur sujet.

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Seliškar nous emmène dans les monts Šar où trois frères, Zekir, Zarif et Zani passent plusieurs mois par an à surveiller les troupeaux familiaux, qui comprennent des centaines de moutons et des dizaines de vaches. Le plus jeune, Zani, reste dans la cabane du bas avec les vaches, tandis que Zekir et Zarif vont plus haut, dans une maison de pierre et de bois, avec les moutons. Pendant l’été, leurs autres frères, plus jeunes, les rejoignent pour apprendre le métier et leur apporter de l’aide. Leur vie est libre des fardeaux de la modernité, mais elle est aussi assez dangereuse, compte tenu des conditions climatiques difficiles et des bêtes, plus hostiles encore, qui peuplent ces lieux. Heureusement, ils ont beaucoup de chiens de berger pour les protéger et leur tenir compagnie. Zekir sert de leader au groupe des frères ainsi que d'enseignant, les préparant à perpétuer cette tradition vieille de centaines d’années, mais à mesure que Zarif grandit, il exprime quant à lui l'envie de s'essayer à une vie plus moderne, différente. Zekir est aussi à un carrefour dans sa vie, car il est en train de devenir trop vieux pour passer autant de temps dans les montagnes avec les moutons. Qui plus est, il se languit de son chien préféré Belichka, retenu par un éleveur louche.

La réalisatrice cherche moins ici à raconter une histoire (alors que son moyen-métrage, plus structuré, allait dans ce sens) qu'à observer les relations entre les frères, et celles qu’ils ont avec la nature époustouflante qui les entour. Et dans un tel isolement (certaines scènes ont été tournées à plus de 2400 mètres d'altitude), où le seul élément structurant est la routine quotidienne, l’esprit des jeunes hommes tend à trop turbiner. Les moments narratifs que Seliškar place dans le film sont à la fois factuels et politiques, de sorte qu’ils ont plus pour effet de brosser un tableau de leur état mental que de faire avancer l’histoire, ce qui fait aussi partie des intentions de la réalisatrice.

Sur le plan technique, The Mountain Won’t Move est vraiment un travail atypique : le tournage s’est effectué sur plusieurs périodes de plusieurs semaines étalées sur cinq ans, dans des lieux difficiles d'accès, et les équipes image et son ont dû suivre les sujets partout pendant leur travail répétitif pendant des journées entières, sur des terrains hostiles, en faisant attention à ne pas entrer dans la champ et à ce pas troubler l’harmonie entre les animaux. Le résultat est absolument formidable sur le plan sensoriel. À partir du point de vue du chef opérateur Brand Ferro, on peut voir à la fois la beauté et le danger de l’endroit à travers des images numériques bien nettes aux couleurs vives et estivales. Cette beauté et ce danger sont encore davantage soulignés par le design sonore de Vladimir Rakić, qui permet de distinguer certains bruits en particulier dans la cacophonie sonore d'ensemble. L'usage austère fait de la musique d'Iztok Koren, de style ethnique, est également une touche appréciable.

On peut à l'évidence dresser des parallèles entre ce film et d'autres documentaires sur des gens qui vivent parmi la nature ou dans les marges de la société, car Seliškar ne cherche pas à redéfinir ces sous-genres. Cependant, The Mountain Won’t Move est un travail profondément personnel qui observe en toute sincérité, et en profondeur, un mode de vie en voie d'extinction.

The Mountain Won’t Move est une coproduction entre la Slovénie, la France et la Macédoine du Nord qui a réuni les efforts de Petra Pan Film, Cinéphage Productions et PPFP. Les ventes internationales du film sont gérées par Open Kitchen Films.

(Traduit de l'anglais)

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