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CANNES 2025 Compétition

Critique : Les Aigles de la République

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- CANNES 2025 : Tarik Saleh boucle sa trilogie du Caire avec un film noir délectable sur les mensonges et la vérité, en propulsant une star du grand écran de choix cornéliens en terrain miné

Critique : Les Aigles de la République
Lyna Khoudri et Fares Fares dans Les Aigles de la République

"Cette affaire vous dépasse", "Comment on en est arrivé là ?" Dans la lignée des passionnants Le Caire Confidentiel [+lire aussi :
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(2017) et La Conspiration du Caire [+lire aussi :
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(2022), Tarik Saleh continue à creuser le sillon du film noir haut de gamme avec le captivant Les Aigles de la République [+lire aussi :
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, dévoilé en compétition au 78e Festival de Cannes. Revisitant les classiques avec un héros ambivalent quadrillant la ville dans sa vieille Jaguar décapotable, une femme fatale, des cercles de pouvoir militaire se piquant de propagande culturelle, un "consigliere" omniscient tel un marionnettiste, l’entrée dans des zones dangereuses, un parfum de complot et de trahison ou encore un pacte faustien contraint et forcé, le cinéaste suédois d’origine égyptienne réussit brillamment et dans une facilité séduisante pour public, son pari de reformulation du genre au pays des Pharaons.

"Je vous conseille de faire très attention quand vous parlez du président." L’acteur vedette George Fahmy (un parfait Fares Fares) se retrouve dans de beaux draps lors du tournage de La volonté du peuple car ce n’est pas de gaité de coeur qu’il a finalement accepté d’incarner le n°1 de l’État égyptien, le maréchal al-Sissi. Légende vivante du cinéma national, buveur et dragueur invétéré vivant séparée de sa femme et en couple avec une jeune femme (Lyna Khoudri) qui pourrait être sa fille, George se croyait intouchable à cause de son immense popularité. Travailler pour le régime ? Il n’y tenait pas du tout malgré les conseils de son agent ("on ne dit pas non à ces gens"). Mais il change rapidement de cap après quelques menaces professionnelles et privées bien senties.

George ne le sait pas encore, mais il n’a plus les bonnes clés pour maîtriser son destin et son impuissance ne fera que croître à mesure que la situation se complexifie sans qu’il n’en maitrise les tenants et les aboutissants, mais en poursuivant en toute inconscience ses manœuvres de Casanova, cette fois avec la femme du ministre de la Guerre (Zineb Triki). Aussi bon acteur soit-il ("les mots sont les vêtements des émotions"), notre aventurier du grand écran doit cette fois, sous la surveillance étroite du docteur Mansour (Amr Waked), interpréter "des mots et des sentiments qui ne sont du tout pas les siens", mais ceux d’un monde bien réel en uniforme devant et derrière la caméra, oeuvrant à se façonner une apparence mythique dans l’imaginaire collectif tout en fomentant des complots en coulisses…

"Détendez-vous. Nous sommes entre nous. Nous sommes le bouclier du pays, les Aigles de la République. Demandez-nous ce que vous voulez." Avec ce troisième volet de sa trilogie cairote, Tarik Saleh adresse avec une patte cinématographique de velours (les talentueux Pierre Aïm à la direction de le photographie et Alexandre Desplat pour la musique) un sourire de loup au spectateur, l’invitant à ne pas se poser trop de questions, mais à se laisser happer par un récit romanesque à suspense et rebondissements excellement maîtrisé qui dispense aussi par petites touches quelques leçons d’Histoire sous la surface de la trajectoire d’un individu familier des masques, mais pris dans la nasse d’un système.

Les Aigles de la République a été produit par la société suédoise Unlimited Stories et la société française Memento Production avec Apparaten (Suède), Ström Pictures (Danemark) et Arte France Cinéma. Playtime pilote les ventes internationales.

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