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KARLOVY VARY 2025 Séances spéciales

Critique : Summer School, 2001

par 

- Dužan Duong brosse dans son premier long-métrage un tableau de la diaspora vietnamienne dans la République tchèque du début des années 2000, à travers un triptyque familial

Critique : Summer School, 2001
de gauche à droite : Doan Hoang Anh, Bui The Duong, To Tien Tai et Le Quynh Lan dans Summer School, 2001

Le réalisateur tchéco-vietnamien Dužan Duong a présenté son premier long-métrage, Summer School, 2001 [+lire aussi :
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, parmi les séances spéciales du Festival de Karlovy Vary. Le film, qui se passe au début des années 2000 en Bohème de l’Ouest, propose un tableau riche en nuances de la diaspora vietnamienne en République tchèque. À travers un récit en forme de triptyque centré sur une seule famille, Summer School, 2001 traite des tensions entre les différentes générations, de déplacement culturel et de la renégociation identitaire qui s'opère chez tout immigrant.

Le film, structuré autour des perspectives d’un père et de ses deux fils, relate les conséquences émotionnelles d’un incident critique tout en exposant les frictions entre intégration, masculinité et dynamiques familiales. Le père, Dung (Doan Hoang Anh), tient un stand de vente de vêtements à un marché local. Hélas, ses dettes l'amènent à dépendre d’une criminel vietnamien local auquel il doit des services rendus au bénéfice de ses deux fils : le mafieux a en effet permis au plus jeune, Tai (To Tien Tai), d'accéder à une éducation, et à l'aîné, Kien (Bui The Duong), 17 ans, d'obtenir les papiers nécessaires à quitter le Vietnam pour rejoindre sa famille en République tchèque. Le film s'ouvre sur un accident après lequel Tai se retrouve à l’hôpital. Le triptyque des perspectives interconnectées qui va suivre révèlera progressivement ce qui s’est passé. Les épisodes forment un portrait de famille dynamique qui aborde des questions comme l’identité, le déplacement et les scissions entre les générations.

Bien que chaque segment s'inscrive dans un genre cinématographique différent, avec ses conventions spécifiques, Duong maintient une approche visuelle et une tonalité cohérente tout au long du film. La photographie d'Adam Mach (Victim [+lire aussi :
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]
) privilégie des éclairages naturels correspondant à la teneur émotionnelle de chaque segment. La structure épisodique permet d'opérer des changements de rythme, sans affecter la cohérence du tout, d'où ressortent progressivement les dynamiques internes de cette famille. Le premier épisode, centré sur Dung, se présente comme un drame criminel. Il examine le dilemme moral du père forcé de choisir entre sa loyauté à sa communauté et ses obligations vis-à-vis d'une figure qui de facto contrôle ses perspectives professionnelles et personnelles. Le deuxième épisode, dédié à Tai, est un récit d’apprentissage estival. Inscrit à l'école d’été du titre pour se préparer à ses études, qui vont bientôt commencer, il vit aussi les rites de passage propres à l'adolescence, ce qui donne à ce chapitre une légèreté juvénile.

Le dernier segment, qui adopte l'angle de vue de Kien, est plus introspectif. Ce dernier ayant vécu le plus gros de sa vie avec sa grand-mère au Vietnam, il doit à présent relever le défi de s’adapter non seulement à un nouveau pays, mais à une cellule familiale dont il a été éloigné depuis des années. Il rejoint le même cursus d’été que son jeune frère afin d’améliorer son tchèque. Cet épisode se mue subtilement en un portrait psychologique, reflétant les difficultés de Kien par rapport à sa situation de déplacé culturel, son isolement, sa souffrance d'avoir été abandonné enfant et ses désirs queers naissants. Bien que les épisodes soient présentés dans l'ordre chronologique, chacun ajoute une dimension au récit d'ensemble, avec des perspectives qui se croisent et révèlent encore davantage de choses sur les personnages et les dynamiques à l'œuvre dans le noyau familial ainsi qu’au sein de leur communauté très soudée.

Summer School, 2001, présenté comme le premier "film viet" tchèque, puise dans l’expérience personnelle du réalisateur et en tant que tel peut être qualifié d'autofiction. Duong glisse entre récit d’apprentissage, film criminel et introspection psychologique, et livre en somme un drame familial qui s’adresse aux cinéphiles comme au grand public. Cependant, dans la mesure où le plus gros des dialogues sont en vietnamien, le film semble s’adresser avant tout à la diaspora. C'est un travail qui brosse le tableau d'une communauté en transition tout en offrant un aperçu de la vie de cette communauté.

Summer School, 2001 a été produit par nutprodukce (République tchèque), AZN kru (République tchèque) et nutprodukcia (Slovaquie), en coproduction avec la Télévision tchèque.

(Traduit de l'anglais)

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