VENISE 2025 Semaine internationale de la critique
Critique : Ish
par David Katz
- VENISE 2025 : Ce drame réaliste par Imran Perretta donne un aperçu de la vie des musulmans britanniques, sur laquelle plane l'ombre du soupçon et de la surveillance policière

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interview : Imran Perretta
fiche film] est une contraction du nom de son personnage principal, Ismael, mais ce titre évoque aussi le suffixe anglais -ish qui, ajouté à un adjectif, le colore d'une valeur approximative : c'est presque ça, mais pas tout à fait. Ish (Farhan Hasnat, trouvé dans la zone où a été tourné le film), un jeune Britannique musulman d'origine asiatique sur le point d'entrer dans l'adolescence, est coincé dans un entre-deux inconfortable, socialement et psychologiquement, car sa mère est décédée récemment. Il a une relation presque fraternelle avec son nouveau grand copain, Maram (Yahya Kitana), mais on est à Luton, une banlieue de Londres où abondent les opérations de police antiterroristes, et donc où même ces deux pauvres gamins candides (et leur bande d'amis) sont souvent victimes du profilage social raciste qui y prévaut. Ce premier long-métrage d'Imran Perretta, qui s'est fait connaître dans le champ de l'art audiovisuel, a été projeté à la Semaine internationale de la critique de Venise.
On pourrait décrire Ish comme un récit d'apprentissage assez classique : le héros va apprendre des leçons douloureuses de ses liens amicaux et de sa situation familiale tumultueuse, avant que la police infiltrée ne vienne tout bousculer violemment. Cela dit, il se peut que Perretta et le scénariste encensé Enda Walsh, qui a co-écrit le film avec lui et dont le travail est connu pour être fortement politique, cherchent ici à montrer que subsister est tout simplement impossible pour les jeunes de ce milieu racial et social après le 11 septembre – depuis cet événement tragique, la vie des musulmans au Royaume-Uni ne cesse de faire l'objet de soupçons constants.
Le début de l'histoire est très innocent : Ish et Maram cultivent leur amitié en construisant un fort dans la forêt du Bedfordshire, à l'orée de la ville. La photographie de Jermaine Canute Edwards captive immédiatement, avec son noir et blanc numérique habilement adouci et patiné à la post-production, sa caméra vigoureusement tenue à l'épaule qui privilégier les angles bas faisant paraître les garçons étrangement géants, devant le décor fané des logements sociaux qui les entoure. L'instabilité et la tendresse établies d'emblée atteignent un point critique quand Maram, d'origine palestinienne, évoque l'antipathie qu'il a pour la police, qu'il compare à l'armée israélienne (des bulletins d'information sur la guerre à Gaza se mettent de temps en temps, au fil du film, à inonder la bande sonore), et s'arme d'un couteau à cran d'arrêt.
La catastrophe principale du film, annoncée par des défilements rapides d'images de surveillance décortiquant de manière augurale les événements, survient quand un van de policiers infiltrés prend les garçons au piège dans une rue résidentielle ordinaire. Maram est chargé dans le véhicule lourdement blindé, probablement pour interrogatoire et fouille, mais Ish s'échappe avant que les forces de l'ordre ne puissent le prendre, choisissant de se protéger bien qu'il risque de donner à son ami malchanceux l'impression d'avoir été trahi.
À partir de là, la tension diminue. Ish retourne chez lui, écoute les conseils de sa grand-mère Nanu (Sudha Bhuchar), avec laquelle il fait l'effort touchant de converser (maladroitement) dans sa langue natale. Maram rejoint quant à lui une bande de garçons plus âgés qui font les gros bras et se comportent comme un petit gang, mais dont l'appétit délictueux se résume à des vols de pétards, pour aller les allumer ensuite dans le bois susmentionné.
L'ambiance d'ensemble créée par Perretta est un des points forts de Ish. Elle élève le film au-dessus de l'exemple type du réalisme social britannique et nous immerge dans la situation compliquée des personnages de manière empirique. Hélas, si l'approche fait forte impression, en termes de contenu dramaturgique, on est plus au niveau de la nouvelle ou du long-métrage court (sans aller jusqu'au simple court-métrage non plus), et la caractérisation des personnages elle aussi paraît mince, surtout comparée à l'incarnation engagée qu'en donnent les acteurs principaux.
Ish est une coproduction entre le Royaume-Uni et les États-Unis qui a réuni Primal Pictures, Good Chaos et Home Team ainsi que BBC Film, le BFI, Calculus Media et Out of Order Studios. Les ventes internationales du film sont assurées par Global Constellation.
(Traduit de l'anglais)
Galerie de photo 30/08/2025 : Venice 2025 - Ish
7 photos disponibles ici. Faire glisser vers la gauche ou la droite pour toutes les voir.



© 2025 Isabeau de Gennaro for Cineuropa @iisadege
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