Critique : Calle Málaga
par Olivia Popp
- VENISE 2025 : Maryam Touzani propose un nouveau récit marocain débordant de vie et d'amour, qui nous engage à réfléchir en profondeur à ce qui sépare les différentes générations

Dans la rue qui donne son titre au nouveau film de Maryam Touzani, Calle Málaga [+lire aussi :
interview : Maryam Touzani
fiche film], vit une septuagénaire nommée Maria Angeles (incarnée par l’actrice espagnole Carmen Maura) vit dans un appartement qu'elle adore, dans l'historique quartier espagnol de Tanger. Après Adam [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film] et Le Bleu du caftan [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film], la réalisatrice marocaine nous amène dans sa ville natale, à l’endroit où sa grand-mère a grandi, pour aborder une histoire diasporique qui scrute la notion de lieu de vie, livrant un film où l'endroit où l'on vit détermine fortement l'identité et où l’identité se façonne au sein de la communauté qu'on habite, et non de manière abstraite. Calle Málaga, écrit par Touzani avec son partenaire Nabil Ayouch (réalisateur notamment d'Everybody Loves Touda [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film], qu'ils ont écrit ensemble), a fait sa première mondiale dans la section Venezia Spotlight de la Mostra de Venise. Le film fera dans la foulée sa première nord-américaine au Festival de Toronto, dans le volet Special Presentations.
Dans ce nouveau travail de Touzani, la fille madrilène de Maria Angeles, Clara (Marta Etura), elle-même mère de famille nouvellement célibataire depuis son divorce, a des problèmes d’argent et compte par conséquent vendre le logement de sa mère à Tanger sans prendre en compte la volonté de cette dernière. Cependant, notre ingénieuse héroïne refuse de quitter sa chère ville de Tanger pour déménager à Madrid et se réinstalle discrètement chez elle avec la ferme intention de racheter tous ses biens, vendus à la va-vite au plus offrant. Ce faisant, elle rencontre le vendeur d’antiquités Abslam (Ahmed Boulane), avec lequel elle finit par nouer une relation amoureuse, après des débuts difficiles.
Avec une touche de comédie légère, Touzani cadre son film autour des relations au sein de cette communauté : les bavardages amicaux de Maria Angeles avec les jeunes et les vendeurs du quartier, sa relation compliquée avec Clara, sa renaissance avec Abslam et son lien unique avec Sœur Josefa (María Alfonsa Rosso), une amie d'enfance qui vit désormais au couvent. Bien que le récit soit par moments confortablement prévisible, l'impression d'ensemble est celle d'une chaleureuse étreinte Virginie Surdej, Touzani baigne le film de teintes orangées et rosées, des façades à l'appartement accueillant de Maria Angeles. Elle prend aussi le temps de bien décrire la relation qui s'épanouit entre Maria Angeles et Abslam, en consacrant une attention toute spéciale à la belle intimité sexuelle qui existe entre eux, chose qu'on montre rarement à l'écran, qu'on laisse souvent cachée.
Au cœur de l’histoire, il y a plusieurs appels à l’action enchevêtrés entre eux – jamais des injonctions, mais simplement des points de connexion que le spectateur pourrait raccorder à sa propre vie et sur lesquels il pourrait se mettre à réfléchir. Par exemple, la relation entre Maria Angeles et Clara nous force à considérer en profondeur les clivages entre les générations, ainsi que ce que signifie prendre les désirs et besoins de ses aînés au sérieux, tout en comprenant que le lien qu'une personne peut se sentir avec un lieu n'est pas forcément identique au vôtre. Si vous vous demandez pourquoi vos parents ou grands-parents sont rétifs à l'idée de quitter la maison où ils ont toujours vécu, Calle Málaga vous donne une petite tape dans le dos et vous explique gentiment pourquoi.
Calle Málaga a été produit par Les Films du Nouveau Monde (France), Ali n' Productions (Maroc), Mod Producciones (Espagne), One Two Films (Allemagne) et Velvet Films (Belgique). Les ventes internationales du film sont gérées par Films Boutique.
(Traduit de l'anglais)
Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.