SAN SEBASTIAN 2025 Compétition
Critique : Ballad of a Small Player
par Alfonso Rivera
- Les spectaculaires décors asiatiques du nouveau film du réalisateur de Conclave sont plus attrayants que son intrigue tarabiscotée et vide, pourtant vaillamment interprétée par Colin Farrell

Macao, excessive, rutilante, n’est pas un des personnages de Ballad of a Small Player [+lire aussi :
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Le film raconte le chemin de croix de Lord Doyle (incarné par un Colin Farrell qui fait de son mieux pour sauver ce personnage pour lequel on peine à ressentir de l’empathie), escroc de métier accro aux jeux qui dépense tout son argent dans les casinos étincelants du Las Vegas asiatique. Notre personnage, criblé de dettes, dos au mur, rencontre soudain une femme mystérieuse (interprétée par l’actrice chinoise Fala Chen) qui va faire prendre à son existence un tour différent tandis qu'il est poursuivi par une autre femme (jouée par une Tilda Swinton histrionique qui semble ne pas croire à son rôle) pour qu'il s'acquitte d'un de ses nombreux paiements dus.
Ballad of a Small Player, saturé de couleurs intensément abrasives (grâce au travail du chef opérateur James Friend), ressemble dangereusement à un feu d’artifice estival, ou à une boule à facettes. Le film, soutenu par une bande originale grandiloquente évoquant un opéra, si invasive qu'elle est en impertinente (un travail de Volker Bertelmann qui semble avoir invoqué pour la composer son compatriote Richard Wagner), est une adaptation par Rowan Joffe du roman du même nom écrit par le journaliste britannique installé à Bangkok Lawrence Osborne, paru en 2014. Tout en se nimbant d'un certain halo existentiel, il accompagne sans répit un personnage perdu dans le baroquisme lumineux d’un monde moderne où tout ce qui est matériel se voit accorder beaucoup trop d’importance.
Le problème, ici, c’est le ton du film, qui évolue entre l’excès, l’accumulation et la parodie, avec un personnage central aussi erratique que l’intrigue elle-même qui confond et rebute le spectateur. De fait, cette déambulation dans un Macao à la fois majestueux et kitsch n’arrive pas à passionner au-delà des lieux extrêmement photogéniques, comme nous l’avons signalé précédemment, où elle se déploie.
Malgré sa volonté de formuler un propos sur la spiritualité, contre l’ambition et le matérialisme, et malgré la rédemption/le salut qui survient à la fin, Ballad of a Small Player fait l'effet d'une collision bruyante entre des éléments qui n’arrivent pas à fonctionner en harmonie : un montage nerveux et des plans égocentriques imitant le Casino de Martin Scorsese, une interprétation saturée du colorisme du cinéma du Wong Kar Wai, trop souvent imité, rarement égalé, et les pitreries d’un grand guignol sans substance. Le film, qui prend des grands airs de transcendance, n'est, somme toute, qu'un défilé d’images criardes et d'éléments clinquants jusqu'à l'indigestion, tandis qu'on suit la cavalcade épuisante de personnages au bord de la crise d'inexistence.
Ballad of a Small Player a été produit par Good Chaos (Royaume-Uni), Nine Hours (Allemagne) et Stigma Films (Royaume-Uni) pour Netflix, qui le lancera sur sa plateforme le 29 octobre.
(Traduit de l'espagnol)
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