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FILMS / CRITIQUES États-Unis / Canada / Royaume-Uni

Critique : Die My Love

par 

- Dans ce drame psychologique torride réalisé par Lynne Ramsay, Jennifer Lawrence rejette la maternité et le mariage et tente d'en réchapper

Critique : Die My Love
Jennifer Lawrence et Robert Pattinson dans Die My Love

L'intégration musicale la plus efficace de Die My Love est le morceau de country moderne “In Spite of Ourselves” de John Prine et Iris DeMent, un duo à deux voix, nostalgique et gentiment grivois, que reprennent en chœur les acteurs principaux du film, Jennifer Lawrence et Robert Pattinson, à un moment clé qui survient vers la fin du film. Il offre un temps de répit dans un film qui fonctionne autrement comme une tornade, une tempête hurlante orchestrée par l'Écossaise Lynne Ramsay avec son dynamisme et son audace visuelle habituels, dans laquelle le personnage de Lawrence, qui devient progressivement mère et femme au foyer (malgré elle), sombre peu à peu dans la maladie mentale. Le film, dévoilé sur la Croisette, en compétition, au mois de mai, arrive à présent avec MUBI dans plusieurs grands pays du monde. Ce n'est pas un titre qu'on se contente de regarder tranquillement, mais un film qui vous engloutit pour mieux vous recracher, bien que la profondeur de ses observations sur l'être humain et son efficacité d’ensemble tendent à fléchir sous les assauts de ses mouvements tourbillonnants.

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Lawrence, à l’origine du projet et sa productrice principale, aux côtés de Martin Scorsese (c'est d'ailleurs lui qui lui a recommandé le roman d’Ariana Harwicz dont le film est l'adaptation), est le centre absolu de ce film intéressant mais souvent éprouvant. Elle est d'ailleurs l’actrice la plus iconique et reconnaissable avec laquelle Ramsay ait collaboré à ce jour. Son aura de star ne perturbe pas le récit, mais il en met tous les éléments et toutes les énergies à son service, et son interprétation est solide, imposante même, quoiqu'on y sente sa volonté de faire montre de la maîtrise virtuose avec laquelle elle manie sa palette de jeu, simulant les volte-face spontanées et l’imprévisibilité d’un esprit qui perd pied.

Lawrence et Pattinson incarnent ici Grace et Jackson, en couple depuis longtemps. Elle est écrivaine, il est musicien, et ils viennent de quitter New York pour s’installer dans la petite communauté rurale du Montana dont il est originaire avec le projet d'y fonder une famille et d'y poursuivre dans le calme, sans distractions, leurs projets artistiques. Très vite, un petit garçon (dont on note que le prénom ne nous est pas indiqué) voit le jour. Dans l’isolement et la solitude du cocon familial, l’insatisfaction de Grace quant à son existence l’amène à se détacher progressivement du réel et à avoir des comportements dangereux et autodestructeurs. Si le moment où cela survient, à savoir après l’accouchement, suggère qu'on a affaire à une dépression post-partum, les causes et les effets sont en fait plus complexes : Grace ne réagit pas seulement à l'immobilité forcée des débuts de la maternité, mais aussi aux déséquilibres qui caractérisent le couple monogame traditionnel et au caractère carcéral de sa vie domestique d’Américaine de la classe moyenne. Le charisme des rôles qui ont révélé Lawrence trouve ici une variation acide, perceptible notamment dans l’épilogue du film, qui parodie un scénario de bonheur conjugal à l'eau de rose quand Grace, narquoise, remercie Jackson de l’avoir fait interner (le cadeau de lune de miel dont elle rêvait).

Ces différents thèmes combinés au talent stylistique de Ramsay permettent d'invoquer très nettement la situation d’instabilité psychique : le paysage sonore fait de musiques entraînantes (qui vont du rhythm and blues au punk), les coupes percutantes et les jaillissements soudains de couleurs nous maintiennent rivés à la perspective de Grace. L’effet est saisissant, mais la marge de manœuvre paraît forcée et limitée, faute d'approfondissements plus riches de l'aspect psychologique des choses. À la lecture du livre d’Harwicz, que Lawrence lui avait pitché, Ramsay n’était pas certaine de pouvoir en réaliser une adaptation convaincante – sachant que tous ses films après celui qui l'a révélée, Ratcatcher, ont été tirés de romans, c'est-à-dire qu'elle a prouvé qu'elle savait composer avec maestria des versions visuelles de récits littéraires. Die My Love, à la fois porté et lesté par ses choix esthétiques maximalistes, se révèle d’exécution inégale, confirmant, hélas, les hésitations de la réalisatrice quant à son potentiel filmique.

Die My Love est une coproduction qui a réuni les États-Unis, le Royaume-Uni et le Canada, pilotée par Black Label Media, Excellent Cadaver, Sikelia Productions et Potboiler Productions. 193 en gère les ventes internationales, et MUBI en assure la distribution dans plusieurs grands territoires.

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(Traduit de l'anglais)

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