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LES ARCS 2025

Critique : D’un monde à l’autre

par 

- Jérémie Rénier délivre un documentaire très personnel sur son engagement dans une expédition en Arctique pour faire le deuil de la disparition de Gaspard Ulliel

Critique : D’un monde à l’autre

"Qu’est-ce que je fous là ? Pourquoi j’ai absolument voulu me confronter à ça ? Il n’y a plus rien, à part du blanc, encore et encore, sans fin." C’est à une étonnante, voire dangereuse, aventure riche en nombreux rebondissements que le Belge Jérémie Rénier a décidé de consacrer son second long métrage de réalisateur, le documentaire D’un monde à l’autre, projeté au menu des avant-premières du 17e Les Arcs Film Festival. Un film né d’un chagrin immense ("la mort s’est immiscée dans mes veines jusqu’à atteindre le coeur") provoqué par le décès accidentel en 2022 de Gaspard Ulliel, son meilleur ami, et d’une plongée dans une sévère dépression jusqu’à une improbable rencontre avec l’explorateur Loury Lag qui lui propose de le suivre, de le filmer et de l’accompagner sur le dernier tronçon d’un défi polaire : parcourir 3400 km en Arctique, sur l’océan gelé.

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"À -60°, une erreur ou un mauvais choix et tu meurs." Voilà donc notre réalisateur propulsé à Prudhoe Bay (États-Unis) où son sujet fait ses derniers préparatifs vitaux : gants, tente, ski-kite, traineau, dispositif de sécurité et carabine pour les ours, balise de détresse, GPS, étude des prévisions météo, esquive des autorités locales (car ce genre de projet n'est pas autorisé). "Quelle folie d’être là à suivre un mec que je connais à peine" note le cinéaste dans son carnet de voyage (lu en voix off). Désespérément désireux de se connecter à quelque chose de plus grand que lui, dans la foi mystique que c’est son ami décédé qui l’a amené jusque-là pour une bonne raison, Jérémie Rénier apprend à mieux connaitre son compagnon aventurier. Et lorsque Loury démarre son périple en solo et que le réalisateur prend un petit avion pour l’attendre à l’étape suivante, certaines vérités dérangeantes émergent sur l’organisation de l’expédition. Après une confrontation à Inuvik (au Canada), les deux hommes se lanceront néanmoins ensemble sur la glace, "sur ce désert d’eau immobilisé par le gel : c’était la promesse du voyage." Dans "l’endroit le plus hostile du monde", le cinéaste poursuit sa quête intime et entre dans une autre dimension, un univers "tragiquement beau" et "presque toxique" où il donne beaucoup de sa personne pour dépasser son mal-être profond et renouer avec le monde…

À la fois récit initiatique de tentative de guérison de l’esprit et film d’aventure ultra-physique dans un climat extrême, le documentaire mêle l’introspection sans fard du cinéaste, le portrait d’un explorateur pétri de contradictions et la relation intense qui se tisse (malgré les accrocs) entre les deux hommes. Très efficacement mis en image (Fabien Ruyssen) et en musique (Pierre Aviat et Loup Mormont), D’un monde à l’autre aborde (de façon très touchante et en les incarnant au plus près) des sujets très humains : les faiblesses et les forces, la difficulté de se délester des doutes et du poids écrasant des mauvais souvenirs, la volonté aveugle de les dépasser pour trouver de la sérénité. Le tout dans une nature qui ne fait aucun cadeau et qui oblige à se concentrer sur l’essentiel : "si regarder en arrière te donne du chagrin et regarder en avant te donne de l’inquiétude, regarde à côté de toi."

D’un monde à l’autre a été produit par Chi-Fou Mi et par Vixens.

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