Une spécificité européenne
garante
du pluralisme et de la diversité culturelle
par Jean Noël Dibie
L’impact des technologies de la communication sur la société humaine est incontestable. En juillet 1969, Neil Amstrong a marché sur la lune sous les yeux de plus d’un milliard de téléspectateurs et le 11 septembre 2001, les tours du World Trade Center de New York se sont effondrées en direct sur les écrans du monde entier.
Aujourd’hui, la généralisation des technologies numériques, l’expansion du multimédia et le succès rapide d’Internet
ont bouleversé l’équilibre établi entre télécommunications et radiodiffusion. Avec l’essor de l’interactivité et des échanges multilatéraux, un nouveau cadre social, économique et politique est né : la Société de l’information. Anticiper sa croissance pour mieux l’encadrer est aujourd’hui une priorité pour tous les opérateurs, les industriels et les pouvoirs publics. Et pour mieux préparer l’avenir, l’analyse du chemin déjà parcouru par la télévision est riche d’enseignements.
Entre les deux guerres, la radiodiffusion s’est développée dans des environnements juridiques différents. En Europe, radios privées et radios publiques coexistaient dans un système concurrentiel, à l’exception des Etats totalitaires qui ont utilisé ce média comme instrument de propagande. Aux Etats-Unis, la radio relevait uniquement du secteur privé et le premier amendement de la Constitution (1) américaine ne permettait pas en théorie aux pouvoirs publics de réglementer la radiodiffusion. Cependant, les contraintes techniques de la gestion des fréquences et la législation antitrust du «Sherman Act» (2) conduisirent l’organisme de régulation FCC (Fédérale Commission for Communication) à attribuer les licences d’exploitation radio avec des obligations de pluralisme, de respect des personnes et de fluidité du marché.
Après 1945, les Etats européens nationalisèrent leurs radios pour des raisons économiques, mais aussi politiques car la plupart des stations des pays occupés avaient servi à la propagande.(3) Ces monopoles publics fonctionnèrent jusqu’aux années 80 (sauf en Grande-Bretagne), contrôlant le développement de la télévision. Toutefois, ils évoluèrent avec les mutations économiques, sociales, politiques, et les exigences du pluralisme de l’information. Ainsi, les Etats membres de l’Union européenne adaptèrent progressivement les structures et le financement de leurs radiotélévisions, par choix politiques (Grande-Bretagne, France), décisions constitutionnelles (Italie, Allemagne, Espagne), ou pression du marché (Belgique, Scandinavie).
1 - «Le Congrès ne pourra faire aucune loi concernant l’établissement d’une religion ou interdisant son libre exercice, restreignant la liberté de parole ou de la presse ou touchant au droit des citoyens de s’assembler paisiblement et d’adresser des pétitions au gouvernement pour le redressement de leurs griefs»
2 - La Cour Suprême confirmera la légitimité de l’application du «Sherman Act» aux médias dans son arrêt «Red Lion» rendu en 1969 :
«La Cour a estimé que le premier amendement entendait maintenir un libre marché afin d’assurer la diffusion de la vérité et qu’il convenait de ce fait de faciliter l’accès aux médias pour assurer la protection de l’intérêt général et des droits individuels, notamment, ceux des minorités.»
3 - En Espagne et au Portugal, qui n’ont pas été occupés, les radios commerciales ne seront pas nationalisées.
Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.