Le Cinéma européen soutient le Dialogue Interculturel - Etude de cas: Corazon International
- Fondée en 2003 par le réalisateur allemand Fatih Akin avec Andreas Thiel et le hambourgeois Klaus Maeck, Corazón International a produit des films qui ont reçu des prix, y compris le premier long-métrage d'Akin Head on etThe Edge of Heaven qui sont centrés sur le thème du biculturalisme.
Corazon Films – Un cinéma de migrations et d’identités
Fatih Akin est l’un des jeunes réalisateurs les plus prolifiques d’Europe. En 2007, son film De l’Autre Côté connu une réception enthousiaste de la critique après sa présentation en compétition au Festival de Cannes. Il gagna le prestigieux pris du meilleur scénario. Quatre ans avant cette consécration, le premier long métrage de cinéma de Fatih, Head On, avait remporté l’Ours d’Or au Festival de Berlin pour ce réalisateur alors âgé de 32 ans.
Né à Hambourg de parents immigrés de Turquie, Fatih a un pied dans chaque culture depuis l’enfance et les tensions inhérentes à un tel bi-culturalisme constituent le centre thématique de son oeuvre de réalisateur.
Dans De l’Autre Côté , les péripéties de la vie familiale d’un jeune allemand d’origine turque le poussent à explorer ses propres racines culturelles et à se confronter à ses impressions ambigües de la Turquie contemporaines et des politiques d’immigration allemandes. Dans Head On, un homme et une femme d’origine turque cherchent à se libérer de la dépression et des obligations familiales ; ils semblent trouver cette liberté dans le mariage, avant que ne frappe la tragédie. Leurs voyages intimes sont ponctués par des va-etviens réels entre l’Allemagne et la Turquie, à la recherche d’une identité stable et de la paix intérieure.
Bien que l’identité de Fatih fluctue de façon itinérante entre ce deux mondes, il n’est pas difficile de localiser ses racines d’artistes. Corazón Films est la compagnie qu’il fonda en 2003 avec ses amis et collègues Andreas Thiel et le hambourgeois Klaus Maeck. « Corazón » est le mot espagnol pour « coeur » et le symbolisme n’est pas fortuit : sous ce partenariat dynamique, les trois homme ont fait les films qui leur ont attiré des prix prestigieux et le respect de leur pairs, en Europe et dans le monde entier.
Corazón fut créé à l’origine pour produire Head On, the septième film de Fatih. « L’acteur principal n’était pas facile », se souvient Klaus Maeck. « Fatih et notre collègue maintenant défunt, Andreas Thiel, ont monté Corazón afin de pouvoir participer à la prise de risque financière sur ce flm parce que la maison de production originale était plutôt nerveuse et pensait que cet acteur ne pourrait pas achever le film ». Ils terminèrent néanmoins le film, qui rencontra ensuite la gloire à Berlin. Maeck se souviendra toujours de l’instant ou l’actrice hollywoodienne Frances Mc Dormand leur remis la statuette de l’Ours d’Or : « Avec un grand sourire, elle s’est exclamée :’C’est rock n’roll !’. Nous n’aurions pas pu rêver d’un compliment plus cool que celui là ! ».
Le lien culturel entre Fatih et Klaus fut cimente très tôt à travers une passion commune pour la musique. « J’étais chargé de la musique pour Head On. Musicalement, le film était complexe et j’étais stimulé pas la façon dont Fatih écrivait le scénario avec certains types de musique à l’esprit . Grâce à son approche, j’ai été en mesure de sécuriser les droits sur la plupart des morceaux avant même que nous ayons commencé à tourner ! ». Maeck attribue à Fatih l’élargissement de ses propres horizons musicaux et son introduction à la palette très riche des musique turques.
Maeck s’immergea avec enthousiasme dans ces sonorités nouvelles pour lui, lors de la production de Crossing The Bridge – The Sound of Istambul, un documentaire de long métrage truffé de musique turque style « fusion », combinant le rock et le punk local contemporain avec des éléments de musique traditionnelle. De semblables syncrétismes musicaux étaient aussi audibles dans la bande sonore dans De l’Autre Côté.
Klaus et Fatih partage aussi un appétit pour le déplacement culturel, un thème qu’ils aiment à explorer à travers leurs films. Pour Klaus, l’expérience de ce déplacement se situa au sein de sa propre culture d’origine lorsque, encore jeune dans le Hambourg du début des années quatre vingt, ils devint l’une des sommités du milieu punk-rock : « J’étais propriétaire de la première boutique punk à Hambourg », se souvient-il avec une trace d’humour dans la voix. « La boutique s’appelait, Rip-Off Records, un nom tout a fait approprié, et je croix que qu’elle aura vraiment contribué à lancer un mouvement.
Pendant quelque temps, il y a eu une explosions de petits labels et la boutique est devenu le pivot de la chaîne de distribution du punk allemand et international… Voilà quelle a été mon éducation… ». Un enthousiaste du cinéma depuis sa jeunesse, Maeck a également été l’auteur d’un scénario pour un film audacieux ancré dans la contre-culture punk et axé sur le thème du pouvoir de la musique de mauvaise qualité dans la vie des gens. Le film, intitulé Decoder, fait avec un tout petit budget, et réalisé en formule coopérative avec les membres de la communauté dans laquelle Maeck vivait alors, a disparu sans laisser de traces. Sa seule prétention à l’immortalité est la brève apparition à l’écran de l’excentrique auteur américain William Burroughs.
Maeck voit une continuité directe entre son engagement d’alors dans le milieu punk rock et son partenariat présent avec Fatih : « Nous ne sommes pas intéressés à faire de gros films frimeurs. C’est important pour nous de faire ces films qui disent vraiment quelque chose sur qui nous sommes collectivement aujourd’hui et vers ou nous nous dirigeons. C’est ça l’éthique punk… ».
Après avoir vu De l’Autre Côté ou Head On, il ne serait que trop facile de cataloguer Fatih et Klaus sous la rubrique « cinéastes des problèmes sociaux ». Mais si l’on observe plus attentivement, on découvre des couches d’humour et d’irrévérence. Dans le film en cours de production au cours de l’été 2008, Corazón semble voyager du drame vers la comédie : Mamarosh, réalisé par le cinéaste serbe Moma Mrdakovic, est basé sur l’autobiographie d’un serbe qui obtient l’asile politique aux Etats-Unis pendant que la US Air Force pilonne Belgrade. Ce point de départ devient un filon d’inspiration pour une solide comédie de déplacement culturel et d’ironie politique à la Green Card. La comédie est également une dimension importante de Soul Kitchen, le nouveau projet de Fatih.
« Bien que la comédie était déjà présente dans ses films précédents, surtout Head On, dans son nouveau film, il le prend comme un défi », observe Klaus. « Les thèmes de la mixité culturelle n’ont pas besoin d’être traités comme des prêches austères. Ces problèmes sont faits de matériau humain et doivent être mis en scène d’une manière qui permettent aux gens, où qu’ils se trouvent, de s’identifier. Après tout, nous sommes dans le siècle des migrations et le cinéma doit être focalisé sur ce thème s’il souhaite rester intéressant. »
Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.