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Le cinéma européen soutient le dialogue interculturel-International Children Film Festival Cyprus

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- Le festival international du film pour enfants de Chypre (ICFFCY) a pour objectif de donner aux enfants l’opportunité de voir des films et d’en discuter. La dernière édition a présenté quelques films capables de revendiquer et symboliser les conflits et aspirations à la paix de cette ile divisée.

International Children Film Festival of Cyprus – Le cinéma, passeport entre deux communautés divisées

West Side Story est un classique renommé dans l’histoire du cinéma. Bien que le film ne soit pas considéré comme un chef d’oeuvre, il est néanmoins célébré à cause de la musique virtuose de Leonard Bernstein et les thèmes universels de l’amour et du conflit ethnique. Cette année, West Side Story est au programme du International Children Film Festival of Cyprus (ICFFCY). Peu de film pourrait prétendre symboliser mieux que celui-ci le conflit et l’espoir d’une paix future dans ce pays divisé.

L’invasion turque de 1974 a eu pour effet la scission de l’île en deux parties : les chypriotes grecs au sud et le chypriotes turcs au nord, ou sont encore stationnées des divisions de l’armée turque. Les nations Unies ont établi une « Zone Tampon » de trois cents kilomètres le long de la « Ligne Verte ». Voilà trente ans que les chypriotes vivent dans un état de trêve fragile des deux côtés de cette fracture. Le réchauffement des relations depuis quelques années a mené à un assouplissement du ban sur les passages d’un côté vers l’autre et créé ainsi de opportunités de rencontre entre les deux communautés. Cependant, une solution durable au conflit n’est pas à l’horizon.

C’est avant tout l’amour du cinéma, non pas le désir de promouvoir la paix, qui motiva deux femmes employées de l’école privée anglaise de Highgate à Nicosie, pour lancer le Children International Film Festival en 2004. « Bien entendu, l’idée de jeter des ponts entre les grecs et les turcs de l’île était présente à notre esprit, mais nous avons pensé que nous pourrions accomplir cela en faisant appel à une passion partagée pour le cinéma », dit Evanthia (Eva) Argyrou, co-fondatrice du festival avec la directrice des études des médias de l’école de Highgate, la française Bérengère Blondeau. Les deux femmes furent bientôt rejointes par l’éducatrice française Françoise Arnoult, qui vivait et travaillait également sur l’île.

Pour commencer, le festival fut une affaire modeste : quelques projections coordonnées entre Highgate et une autre école anglaise de Nicosie. Dés la deuxième année, Eva, Françoise et Bérengère, enhardies par leur succès initial, étaient déterminées à faire profiter du festival tous les enfants de l’île. Leurs démarches pour s’attirer la coopération des autorités cypriotes turques coincidèrent avec l’assouplissement des règles limitant le passage d’un territoire à l’autre. « Avant cette époque, nous avions collaboré avec les turcs sur un livre de contes traditionnels en version trilingue », se souvient Eva. « Les restrictions étaient telles que le seul lieu où nous puissions nous rencontrer pour discuter de la publication était le village de Pyla, dans la Zone Tampon des Nations Unies ».
En 2005, le festival s’est tenu dans la section de la Zone qui traverse Nicosie, dans le vieux Ledra Palace, autrefois un hôtel de luxe. Comme beaucoup de bâtiments de la Zone, le Ledra était très dilapidé : ce fut la première fois que les enfants de toutes les communautés de l’île - elles incluent les chypriotes grecs, les chypriotes turcs mais également les arméniens et le maronites, ainsi que les familles des casques bleus des Nations Unies – étaient réunis tous ensemble à l’intérieur de la Ligne Verte.

La rencontre eut lieu à l’occasion d’un weekend intercommunal de créativité cinématographique, qui est depuis devenu la clé de voûte du festival. « Le weekend est une occasion pour des enfants venus des quatre coins de l’île d’explorer l’art du cinéma et de développer leur savoir faire ensemble », dits Ioannis Soulos, le directeur des projets de ICFFCY. L’évènement se divise en différents ateliers couvrant différents aspects techniques, depuis le storyboarding et l’animation, jusqu’à la conception des posters et la production numérique. Les enfants sont répartis par groupe d’âge, toutes les communautés étant mélangées ensemble et une équipe multilingue est là pour aplanir les difficultés de communication et pour prêter assistance aux enseignants venu de différents pays. « L’objectif des ateliers est toujours, si possible, que les équipes complètent un court métrage », ajoute Ioannis.
En 2007, un groupe d’enfants de 14 ans produisirent Nathalie, un court métrage sans dialogue sur une jeune fille en danger de sombrer dans la drogue. D’autres firent un documentaire dans lequel ils recueillaient les impressions de jeunes chypriotes sur leur expérience de vivre sur une île divisée.

Coordonner les projections de films entre les deux frontières n’est pas une sinécure pour le ICFFCY. A l’origine, ces projections avaient lieu dans les bâtiments officiels de diverses organisations internationales à l’intérieur de la Zone. Depuis que les passages ont été rendus plus aisés, ces projections ont lieu dans des cinémas des deux côtés de Nicosie.

Qu’en est-il de la collaboration avec le secteur turc ? « Au début, il y avait un petit problème de confiance, car ils voyaient bien que le parrainage de l’événement provenait du côte grec » se souvient Ioannis. ICFFCY es soutenu principalement par le Ministère de l’Education et de la Culture. « Cependant, après quelque temps, la passion des enseignants pour l’idée de familiariser les enfants au cinéma est devenu une cause commune et nous avons trouvé moyen de travailler ensemble ». En 2007, KAYAD, une association caritative chypriote turque spécialisé dans les problèmes des femmes aura été le partenaire de ICFFCY au nord de l’île, mettant à contribution son réseau de familles locales pour mobiliser les parents et les enfants. En 2008, ce fut le tour d’une autre association cypriote turque, Side Streets d’être partenaire de l’événement. « Nous avons en commun une vision de ce que doit être le festival, c'est-à-dire sa vocation de familiariser les enfants à une palette de films qui ne sont pas disponible dans les cinémas commerciaux », dit Eva, qui spécialement fière des fiches et livrets pédagogiques produits en coopération entre les enseignants des deux communautés.

« A lui tout seul, le cinéma ne peut pas induire la réconciliation à travers des lignes de fracture politiques et communautaires. Néanmoins, en faisant appel à une passion partagée, on peut aider les générations nouvelles à mettre l’accent sur ce qui les unit plutôt que sur ce qui a divisé les générations précédentes. Nous espérons que ICFFCY peut jouer modestement son rôle dans ce processus », conclut Eva.

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