email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

VENISE 2023 Hors-compétition

Critique : The Palace

par 

- VENISE 2023 : Le film de Roman Polanski que tout le monde craignait le plus de voir arriver à Venise cette année s'avère très révélateur, consciemment ou pas

Critique : The Palace
de gauche à droite: Joaquim de Almeida, John Cleese et Oliver Masucci dans The Palace

Il existe une manière d'aborder la critique qui consiste à percevoir les films plus comme des fenêtres sur les habitudes et l'inconscient de leurs auteurs, et non comme de l'art ou du divertissement. Par l'effet de cette manœuvre, The Palace [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
passe du statut de bide mort-né destiné à être vu par très peu de gens après sa projection hors-compétition à Venise à celui d'objet à étudier ou analyser, ou peut-être à inspecter en combinaison de protection, armé de pinces.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)
Hot docs EFP inside

Roman Polanski ayant été "effacé" au-delà de tout ce qu'on aurait pu imaginer, et il ne l'a pas volé, cette comédie caustique fantaisiste est l'inscription qu'il a choisi de gratter sur le mur de sa cellule de prison. Dans le contexte du tumulte de la tension qui a précédé le passage au nouveau millénaire et de la luxueuse station de ski de Gstaad, en Suisse (réputée comme un des lieux les plus chers du monde), lui et ses co-scénaristes Jerzy Skolimowski et Ewa Piaskowska (duo encensé après EO [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
dont il a pu, apparemment, obtenir la participation) ont choisi d'épingler les 1%, comme on ne les appelait pas encore à la fin de l'année 1999. L'atmosphère et le type de caractérisation fondé sur l'exagération auquel nous ont habitués S [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Ruben Östlund
interview : Ruben Östlund
fiche film
]
ans filtre et Glass Onion dernièrement ont une grande place dans ce film – il faut dire que ce type d'angle est assez typique de Polanski, qui a toujours cherché à démasquer les injustices et les préjugés (Chinatown en fournissant l'exemple le plus complexe et réussi), à l’exception notable des cas où c'est lui qui est concerné.

On a là tout un éventail de stéréotypes grotesques, tous d'étrangement bonne et joyeuse compagnie sur les 100 courtes minutes que dure le film : John Cleese dans le rôle d’un milliardaire texan à l'article de la mort nommé Arthur William Dallas III, Mickey Rourke dans celui d'un certain Bill Crush, un escroc à la Trump portant moumoute blonde, et Fanny Ardant en grande dame toujours accompagnée d'un petit chienchien de la taille de ses différents sacs à main scintillants. Le film est conscient de sa propre absurdité, et peut-être de son caractère jetable : au moment du gros plan sur le pingouin qu'Arthur offre à sa femme de 20 ans et quelques Magnolia (Bronwyn James), on ne peut que rire de la mauvaise qualité de l’animation collée sur les images filmées (c'est un peu ce qu'on aurait si Paddington [+lire aussi :
bande-annonce
making of
fiche film
]
avait eu un budget effets spéciaux de 50 euros).

Ceci étant, Polanski, qui a été inspiré pour faire ce film par ses propres séjours à Gstaad, connaît à l'évidence très bien ce genre de personnes, et il saisit bel et bien une certaine énergie fin de siècle ou fin du monde, et l'ironie historique du fait que ce sont des personnages infects qui allaient donner le la à ce XXIe délisquescent. On apprend aussi qu'Eltsine va être remplacé par nul autre que Poutine, dans une scène où l'ambassadeur de Russie en Suisse et ses potes gangsters regardent, fascinés, cette annonce sur la télévision de leur suite.

Le film (vu, peut-être de manière erronée, comme une comédie grotesque par la presse présente à Venise) fonctionne mieux si on le conçoit comme une variante de ses anciennes "comédies menaçantes", comme les pièces de Pinter que ses premiers films polonais et britanniques évoquaient souvent : l’effet voulu est peut-être plus une vertigineuse angoisse que le rire. Et aucun des invités qu'on voit ici n'est aimable ou rachetable, un choix qui frappe par la manière dont il tranche avec d'autres films dont les auteurs caressent le public dans le sens du poil en rendant le charisme et la verve des soi-disant cibles de leurs satires follement séduisants. Quelques anicroches à la réception, où des clefs et des pièces d'identité se retrouvent égarées, et où l'accès est toujours conditionnel, renvoient en fait à Kafka.

Le monde est horrible, nos existences scandées par l'horreur et surtout, je (moi le réalisateur) suis peut-être le pire : voilà le sentiment qui domine The Palace. C’est une dernière déclaration instructive de la part d'un des hommes les plus en vue de la culture de la deuxième moitié du XXe siècle. Sur son lit de mort cinématographique, car on suppose que c’est très probablement son dernier film, voilà les derniers mots qu'il marmonne avant le grand sommeil.

The Palace est une coproduction entre l’Italie, la Suisse, la Pologne et la France qui a réuni les efforts d'Èliseo Entertainment Moving Emotions Production, CAB Productions, Lucky Bob, RP Productions et RAI Cinema. Les ventes internationales du film sont assurées par Goodfellas.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)


Galerie de photo 02/09/2023 : Venise 2023 - The Palace

25 photos disponibles ici. Faire glisser vers la gauche ou la droite pour toutes les voir.

Fortunato Cerlino, Oliver Masucci, Milan Peschel, Fanny Ardant, Luca Barbareschi, Joaquim De Almeida, Alberto Barbera
© 2023 Fabrizio de Gennaro for Cineuropa - fadege.it, @fadege.it

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy