Critique : Totem
par Aurore Engelen
- Fred de Loof ose une comédie en mode slasher fantastique, pastiche délicieusement régressif qui suit une troupe d’adulescents qui revivent le camp scout qui a changé leur vie
Remarqué avec ses courts métrages résolument déjantés (The Glorieux Peanuts, Les Pigeons ça chie partout ou encore Caca Boudin), Fred De Loof (également aux manettes de la prochaine série de la RTBF, Baraki, premier format 26 minutes pour la chaîne publique francophone qui sera diffusé à la rentrée), signe avec Totem [+lire aussi :
interview : Fred De Loof
fiche film], un premier long métrage réalisé dans le cadre de l’aide aux productions légères du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la Fédération Wallonie-Bruxelles et sélectionné à présent en Compétition Nationale au Brussels International Film Festival, une comédie joyeusement grossière, nourrie de références aux cinémas de genre qu’affectionne le réalisateur.
Il y a 20 ans déjà, la patrouille scoute des loups perdait l’un des leurs, le jeune Ludovic, dans de mystérieuses conditions. 20 ans plus tard, Buffle (Fred De Loof) est toujours hanté par cette disparition. Un traumatisme émotionnel qui prend l’apparence pour le moins perturbante d’un Rat Géant qui surgit à tout bout de champ. Un rat… Tiens donc, comme l’animal totem de Ludovic.
Buffle invite alors son ancienne patrouille (François Neycken, Quentin Marteau, Pablo Andres et Xavier Seron) sur les lieux de ce camp maudit, pour un week-end de thérapie de groupe qui devrait leur permettre d’affronter leurs vieux démons. Malheureusement, les choses vont prendre une tournure inattendue lorsque le petit groupe va découvrir au fond de la feuillée (ndlr : pour les lecteur·ices peu aguerri·es aux us et coutumes scout, la feuillée, ce sont en fait les latrines) rien moins qu’un passage spatio-temporel.
On est donc face à un phénomène très rare de feuillée à remonter le temps. Pourquoi se contenter de rejouer le passé quand on peut le revivre ?
Attention néanmoins à ne pas se laisser berner par cette comédie qui assume crânement ses blagues scatologiques, qui sont même au coeur de son dispositif narratif. Car derrière les blagues de cour de récré se cachent de vrais problèmes de cour de récré. L’air de rien, avec le bizutage dont le jeune Ludovic est l’objet, se profile la question du harcèlement, et derrière encore, cette question qui déchaîne aujourd’hui les passions : peut-on rire de tout?
On laissera à chacun·e la liberté de se faire son idée, mais il est néanmoins clair que beaucoup riront devant Totem, qui tient autant de la plaisanterie potache de sale gosse, que de la déclaration d’amour au cinéma, multipliant les références, s’amusant avec entrain des poncifs aussi bien des films qui voyagent dans le temps que des slashers ou des films de serial killer. Trou de ver, paradoxes temporels, copycat, théorie du chaos, tout ou presque y passe joyeusement, avec un goût certain pour les jeux de mots appuyés.
Une comédie délicieusement régressif, à l’image d’ailleurs de la performance des différents comédien·nes, jeunes et moins jeunes, qui s’en donnent à coeur joie pour caresser l’outrage et la caricature dans le sens du poil.
Dans les rôles des "adultes", on retrouve des visages bien connus du cinéma belge contemporain. Si Fred De Loof, également comédien, interprète le rôle titre, on retrouve à ses côtés François Neycken, (qui à co-écrit le film, a été vu récemment dans Escapada [+lire aussi :
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interview : Sarah Hirtt
fiche film]), Quentin Marteau (très actif au théâtre, à l’affiche également de Sympathie pour le diable [+lire aussi :
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interview : Guillaume de Fontenay
fiche film], ou de la série Arte Moloch), Pablo Andres (comédien humoriste que l’on verra bientôt dans un tout autre registre dans Entre la vie et la mort [+lire aussi :
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interview : Giordano Gederlini
fiche film] de Giordano Gederlini), Céline Peret (découverte dans Coquelicots) ou encore le réalisateur Xavier Seron (qui confirme ici devant la caméra le timing comique qu’il a déjà prouvé derrière).
Totem est produit par 10.80 Films.
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